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« Fabriqué par des femmes », un livre sur les travailleuses de l’habillement

Vanessa GAUTHIER

01 / 2008

« Les travailleurs dans l’industrie de l’habillement sont en majorité… des femmes » : c’est à partir de ce constat qu’est née l’idée du livre « Fabriqué par des femmes». Conçu par la Clean Clothes Campaign (voir la fiche Le Collectif Ethique sur l’étiquette, relais en France de la Clean Clothes Campaign) et édité en français par Peuples Solidaires et la Campagne Vêtements Propres, ce recueil de textes jongle entre témoignages de militantes du monde entier, dans leurs luttes quotidiennes, et analyses plus approfondies sur les interactions et les contradictions entre droits des travailleurs et droits des femmes.

Le fait que les travailleurs de l’industrie du vêtement sont des femmes ne peut pas être ignoré. D’autant plus qu’avec la féminisation de l’emploi, c’est aussi la précarisation et la flexibilisation de l’emploi qui s’installent. Le livre «Fabriqué par des femmes » a voulu mettre en lumière ces femmes, les rendre, pour une fois, visibles. Car ces dernières, qui ne sont déjà pas reconnues dans la société en général, ne le sont pas non plus au travail ni dans le mouvement syndical. Le premier objectif de ce livre est ainsi de traiter d’un sujet qui est rarement analysé en tant que tel.

« Fabriqué par des femmes » permet par ailleurs de comprendre la réalité des femmes qui travaillent, les contraintes spécifiques auxquelles elles sont confrontées et de mieux appréhender les raisons qui expliquent que les femmes occupent majoritairement les emplois les plus précaires, que ce soit en Haïti, en Chine, ou en Tunisie.

Les femmes sont les plus précaires. Pourquoi ?

La plupart des sociétés n’accordent aux femmes qu’un accès limité aux ressources, à l’éducation, au crédit etc., ce qui les maintient dans une situation de vulnérabilité économique, politique et sociale. Par ailleurs, les politiques néo-libérales, mises en place depuis les années 1970 aggravent cette situation. Si la mondialisation permet aux femmes d’accéder à l’emploi et donc d’être plus indépendantes économiquement, leurs conditions de travail se détériorent de façon alarmante, au Nord comme au Sud.

Les femmes sont notamment majoritaires dans deux catégories de travailleurs, les travailleurs du secteur informel et les travailleurs migrants. Ce sont deux groupes de travailleurs qui sont particulièrement précaires et soumis à des conditions de travail abusives. N’ayant ainsi pas de protection légale, elles sont invisibles au regard de la loi et ne peuvent faire valoir leurs droits, qu’elles ignorent d’ailleurs pour beaucoup d’entre elles. Ainsi, si l’on veut défendre les droits des femmes, c’est aussi les phénomènes migratoires et le secteur informel qu’il faut oser analyser, sinon l’échec est garanti.

Défendre les droits des femmes pour mieux défendre les travailleurs

En lisant cette série d’articles, on prend pleinement conscience que pour renforcer la défense des droits humains au travail, il est indispensable de réduire aussi les inégalités entre les sexes. Parce que les différences hommes femmes, que nous vivons tous et toutes au quotidien influent sur les pratiques dans le cadre du travail. Il faut savoir les analyser objectivement, démystifier les inégalités hommes/femmes et dépasser les querelles sur les terminologies pour saisir le rôle central du genre. Par exemple, le rôle que les femmes occupent dans l’économie « domestique » le temps qu’elles y passent, l’investissement physique, moral et émotionnel qu’elles y mettent influe énormément sur la configuration de leur emploi. L’inverse est aussi vrai : les conditions de travail des femmes influent par exemple sur le foyer et sur la famille.

Il faut donc savoir prendre en compte le statut social des femmes, leurs rôles, leurs contraintes, leurs avantages, et donc adapter les solutions proposées aux réalités vécues des travailleuses et évidemment pas seulement pour les travailleuses du textile…

Ces mécanismes doivent être pris en compte au sein des syndicats, mais doivent aussi être inclus dans les codes de conduite, les législations locales et la sphère gouvernementale, mais aussi par les ONG et les travailleurs sociaux, qui ont parfois le réflexe de considérer les travailleurs comme des êtres neutres, asexués, et à les couper de toute autre caractéristique sociale. Il n’est finalement pas possible de prétendre défendre les travailleurs dans toute leur diversité et leur spécificité, sans accorder une lecture particulière de la situation des femmes.

Il s’agit donc de prendre en compte leurs besoins et les stratégies qu’elles proposent, trouver des mécanismes qui puissent libérer leur parole, les renforcer pour qu’elles défendent mieux leurs droits dans le cadre du travail et ailleurs. Renforcer le pouvoir des femmes, qui sont au plus bas de l’échelle des travailleurs sur le plan mondial, c’est renforcer tous les travailleurs, car elles sont une porte d’entrée, qui peut bénéficier à tous, par extension. Améliorer la situation des femmes dans les domaines social, sanitaire, économique, politique, dans l’accès et le contrôle des ressources, c’est finalement aussi lutter pour les droits humains au travail. Il s’agirait d’une erreur stratégique que de l’ignorer et c’est ce que montre « Fabriqué par des femmes ».

Pour cela, « Fabriqué par des femmes » ne s’embarrasse pas de discours hermétiques et théoriques. Les femmes qui y ont contribué sont toutes des militantes de terrain, pour les droits des femmes au travail. Certaines témoignent de leur cheminement et de leur expérience tantôt en tant que militante syndicale dans un pays de production, tantôt engagée volontairement au sein d’ONG qui sensibilisent les consommateurs du Nord.

Cette publication est envisagée comme un lieu de ressources pour bâtir la prise de conscience de ceux et celles qui sont impliqués dans la défense des droits des travailleurs à la lumière de la question du genre. Elle peut aussi servir de source d’informations pour ceux qui, au sein des entreprises ou des initiatives multipartites, traitent des questions liées aux conditions de travail dans le secteur de l’habillement. Elle n’a pas eu pour but d’atteindre directement les femmes au travail (si cela arrivait, cela serait un plus), mais plutôt de faire en sorte qu’il soit possible d’entendre leurs voix, et que leurs revendications et leurs souffrances soient connues et comprises par ceux, hommes ou femmes, qui sont en situation d’influer sur leurs conditions de travail.

Key words

women work, women's rights, working conditions, human right abuses, textile industry, precarious employment, international trade

file

Defending Womens’ Rights in the Workplace in Developing Countries

Source

Clean Clothes Campaign, Peuples Solidaires, Campagne Vêtements propres, Le Monde selon les femmes, Fabriqué par des femmes : Travailleuses de l’industrie et de l’habillement et mouvements pour les droits des femmes, Edition originale en anglais, 2005, Edition française, 2007, 127 p.

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