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Comment faire face à la violence à l’école ?

A Saint Etienne du Rouvray (France) la médiation comme outil pour les scolaires

Manuelle DAMAMME

04 / 1996

A Saint Etienne du Rouvray (Seine Maritime), adultes et élèves ont mis en place une pratique de la médiation et de la gestion des conflits. La médiation n’est certes pas le remède-miracle, mais l’éducation à la gestion des conflits constitue l’une des tâches prioritaires de l’école. N’est-ce pas le lieu d’éducation à la citoyenneté ?

L’école Jean Macé et le collège Robespierre sont deux établissements importants de la Zone d’Education Prioritaire (ZEP)de Saint-Etienne du Rouvray. S’il était logique que les deux établissements se retrouvent dans une action commune, cela est pourtant le fruit de multiples paramètres et étapes. Quand le Conseil de ZEP, en janvier 1992, évoqua la nécessité de travailler sur la "restauration de la citoyenneté", cette orientation fut suffisamment partagée par de nombreux partenaires pour qu’un programme sur "la violence et la gestion des conflits" soit élaboré. C’est au sein du dispositif piloté par l’Etat dénommé "Services publics de proximité", que se mirent en place les premières actions, réflexions et formations par le biais d’un outil retenu collectivement : le théâtre-forum. C’est avec "Arc-en-ciel ", compagnie parisienne dont le programme annonçait du "théâtre’à la ZEP" que nous avons engagé un travail qui se poursuit encore ce jour.

Le constat fut fait au bout d’une année de la nécessité d’accompagner le théâtre-forum par d’autres démarches : il s’agissait, au-delà d’une expression indispensable sur les vécus et les préoccupations des jeunes, de tenter de les amener à intervenir réellement sur ces conflits. C’est par le biais d’un cycle de formation organisé par les "Services des Actions de l’Etat" que se produisit la rencontre avec Jean-Pierre Bonafé-Schmitt, chercheur au CNRS : la "médiation" telle qu’il la décrivait en usage dans certains quartiers apparut comme une voie à explorer.

Jean Pierre Bonafé-Schmitt est aujourd’hui engagé avec nous dans une expérimentation sur trois ans. C’est donc sur le principe d’une recherche-action que nous travaillons, avec, en décembre prochain, un stage ZEP pour une formation des adultes aux techniques utilisées (théâtre-forum et médiation)avec l’intention affichée, et en accord avec eux, de se passer de nos mentors...

En février 1994, l’expérience a pu démarrer avec deux classes (CM1-CM2 et CM2)de Jean Macé et deux classes (6ème et 5ème)de Robespierre. En s’engageant dans cette action, les enseignants ont déclaré vouloir, comme le précise Bruno Pesquet, cheville ouvrière de l’action à l’école Jean Macé, "petit à petit, amener les enfants à privilégier le dialogue, de préférence à la violence, à reconnaître à d’autres (leurs pairs)le droit d’intervenir pour tenter de rétablir le dialogue, à s’approprier des règles de vie collectives et à les accepter, leur faire observer des situations de conflits et rechercher des méthodes pour rétablir "la paix", sans pour autant se faire trop d’illusions car des habitudes se sont ancrées, dans ce quartier, qui ne s’effaceront pas, d’un coup de baguette magique ".

Tout d’abord, un questionnaire a été proposé aux enfants afin de cerner les représentations et leurs pratiques en matière de gestion de conflits. Ces questionnaires anonymes ont été ensuite dépouillés par le laboratoire de recherche de Jean-Pierre Bonafé-Schmitt. Les réponses aux questions qui permettent, et aux adultes et aux enfants, de s’interroger sur la perception des relations adultes-enfants, enfants-enfants, ont été globalement présentées lors d’une séance publique, il y a un an. Elles seront comparées aux réponses que feront les élèves, à la fin de l’expérience, lorsqu’ils seront soumis à nouveau au même questionnaire, pour évaluation du programme.

Dans un deuxième temps, une sensibilisation à la démarche et une explication des concepts ont été mis en oeuvre par Jean-Pierre Bonafé-Schmitt. Des jeux de rôles qui ont permis une implication de tous les élèves ont été filmés, puis analysés à la séance suivante par tout le groupe. Cette phase a permis d’approfondir le rôle des futurs médiateurs, et d’observer leurs capacités d’écoute, d’aide à la recherche de solution aux conflits. C’est à cette étape que, sur proposition des enseignants et avec les conseils du chercheur, furent cooptés des jeunes susceptibles de devenir médiateurs. "Dans chaque classe, le choix des adultes reste déterminant : pour que l’expérience puisse se prolonger sur trois ans, pour que les enfants puissent fortifier les compétences requises et les transmettre à d’autres ultérieurement, et surtout pour qu’ils ne développent pas des comportements de caïds... Cela ne veut pas dire qu’il s’agisse pour autant d’éléments n’ayant pas de problèmes avec la discipline : certains auraient même des rapports plutôt vigoureux avec leurs camarades ". Restait à parfaire leur formation, à mettre en oeuvre les modalités de leur intervention, à rédiger un guide du médiateur-élève, et à assurer la promotion du dispositif .

En février 1995 eut lieu au collège la toute première médiation, avec des élèves qui s’étaient donc engagés dans ce cycle l’année précédente : le fait mérite d’être noté, car il ne faut surtout pas imaginer que l’instauration d’un tel dispositif est instantané. Depuis, d’autres classes sont entrées dans le dispositif.

Key words

theater, mediation, training, social violence, peace education, school mediation


, France

Comments

Les enseignants ont bien conscience que " les vraies causes de cette violence à l’école, reflet de la violence du quartier, ne seront pas résolues pour autant. lls savent que les médiateurs enfants ne pourront rien faire contre la concentration de population, génératrice de bruits, ni contre l’oisiveté engendrée par le chômage ou l’exclusion ".

Ce qui pourrait naître d’une telle expérimentation c’est, à long terme, le désir de mieux verbaliser les conflits, que ce soit entre adultes, entre élèves, entre adultes et jeunes. Si, comme cela semble être le cas ici, les parents eux-mêmes reconnaissaient la valeur de méthodes de communication moins violentes, si les jeunes formés aujourd’hui étaient capables de transmettre dans leur quartier, demain, des comportements de gestion de la vie collective, l’école aurait joué son rôle de formation à la citoyenneté.

Notes

M.Damamme est coordinatrice de la ZEP de Saint-Etienne du Rouvray. La coordination de la ZEP diffuse une cassette video intitulée "Si on s’parlait" et qui présente la démarche de médiation et la sensibilisation des élèves

Contact : ZEP Coordination, Parc des écoles Wallon, rue du Jura, 76800 Saint-Etienne-du-Rouvray.

Source

Articles and files ; Interview

DAMAMME, Manuelle in. Non violence actualité, 1995/06 (France), 192

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