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La médiation n’est pas réservée aux adultes !

Dans un collège de Sarcelles,M comme Médiateurs

04 / 1996

17 jeunes de 12 à 14 ans sont devenus médiateurs dans leur collège, à Sarcelles, après une formation de plusieurs mois. A l’origine de cette expérience originale et encore trop rare en France, deux enseignantes inquiètes de l’accroissement de la violence.

"Le projet de former des élèves qui pourraient remplir la fonction de médiateurs en classe ou dans la cour de récréation est né pendant l’année scolaire 1992-93. Nous sommes deux enseignantes, qui travaillons dans un établissement privé sous contrat regroupant école, collège et lycée à Sarcelles. Il y a trois ans, nous avons été particulièrement marquées par la montée de la violence à l’extérieur mais aussi à l’intérieur de l’établissement : élève témoin d’un meurtre dans sa cité ; élèves blessés par leurs camarades ; enseignants frappés par des élèves...

Nous avons cherché à savoir ce qui se faisait en France (en matière de médiation scolaire). Nous avons proposé d’animer un atelier "Violences - résolution des conflits-médiation" et présenté à l’équipe de direction puis aux délégués des parents d’élèves un projet très précis qui a été accepté. Ainsi, nous avons rencontré à deux, pendant toute l’année et tous les quinze jours, vingt quatre garçons et filles entre douze et quatorze ans. Ces séances duraient une heure et quart et concernaient au début des élèves peu motivés par le sujet.

Nous avons repris, en l’adaptant, le contenu d’un certain nombre de stages que nous avions suivis depuis une dizaine d’année (Université de Paix de Namur, Communauté de l’Arche de Lanza del Vasto, Cun du Larzac, Mennonites...). Nous avons également profité d’expériences de médiation menées dans le cadre de la juridiction pénale. Travailler avec des élèves de cinquième est particulièrement intéressant : les jeunes de cet âge ont déjà une certaine maturité et encore une relative confiance dans l’adulte. A la période de la pré-adolescence, ils cherchent à mettre des mots sur ce qu’ils ressentent. Nous avons d’abord travaillé à partir de jeux, de questionnaires permettant aux jeunes d’observer leur façon habituelle de gérer les différends et leur environnement. Les premières séances sont consacrées à une mise en confiance, à une meilleure connaissance des élèves entre eux et des valeurs auxquelles ils croient et dont ils savent faire preuve. Nous apprenons aux élèves à avoir sur eux et ceux qui les entourent un regard positif, ce qui est très difficile pour certains qui ont tendance à ne voir que leurs défauts. Nous privilégions l’application des principes de la non-violence. Nous utilisons également les dessins, l’expression corporelle et les rêves éveillés, tous moyens permettant aux collégiens de réfléchir et d’expérimenter autrement. Dans un deuxième temps notre travail est surtout basé sur des jeux de rôle concernant les conflits vécus et choisis par les élèves, ainsi que sur la tâche de médiateur. Raconter, plutôt que se bagarrer

Nous employons les techniques du "brain storming" et rejouons les conflits jusqu’à trouver une solution ne désignant ni perdant ni gagnant et qui soit donc acceptable par tous. Des exercices d’écoute et de reformulation sont intégrés aux ateliers. C’est seulement en mars que nous avons proposé aux élèves qui avaient commencé à voir plus clair dans les conflits auxquels ils étaient mêlés, de devenir médiateurs. Ce fut une étape importante qui a nécessité un gros travail pour que la médiation soit comprise et acceptée. Les futurs médiateurs sont allés avec enthousiasme présenter la médiation dans les quatorze classes du primaire et les dix classes de sixième et cinquième. De notre côté, nous avons rencontré certains professeurs, toutes les institutrices et les surveillants. La médiation devait être assurée sur la cour de récréation entre 12h et 13h15 et il était nécessaire que tout le monde soit informé. Une salle de permanence était à la disposition des médiateurs, eux-mêmes reconnaissables par un dossard marqué "M" de façon très visible. Des vacances de printemps jusqu’à la fin juin, les médiateurs, par groupes de quatre (deux garçons, deux filles), assurèrent très régulièrement leur fonction quotidienne dans la cour.

Les enfants du primaire firent volontiers appel à eux, parfois également des sixièmes mais il était rare que des jeunes de leur classe leur demandent d’intervenir. Les médiateurs firent preuve de beaucoup de sérieux et d’imagination. Bien sûr, ils ont eu parfois tendance à proposer des solutions alors que l’idéal était que celles-ci viennent des jeunes en conflit. Mais quand il s’agissait des petits, ils manquaient souvent d’expérience et de vécu leur permettant de trouver eux-mêmes des réponses.

Sur 24 élèves ayant participé à cet atelier de formation à la médiation et qui n’avaient, au début, aucun motivation particulière, 17 ont souhaité être médiateurs dans la cour. En fin d’année, une douzaine souhaitait pouvoir continuer sur ce thème à la rentrée prochaine. Plusieurs proposaient d’aider à leur tour à former d’autres médiateurs. Quelques uns insistèrent sur le fait que cette formation a eu des répercussions sur leur vie quotidienne, dans les disputes auxquelles ils sont mêlés.

Si certains médiateurs ont essuyé des moqueries, ils ont suscité également de l’envie chez les plus jeunes du primaire qui ont dit souhaiter devenir dans leur classe de "petits médiateurs" : envie aussi chez d’autres élèves qui ont demandé, en dehors des heures de cours, une formation qui a pu leur être donnée, mais un peu trop rapidement. Les institutrices sont neutres ou favorables. Certains surveillants de cour ont joué le jeu et dirigé les enfants en conflit vers les médiateurs. Côté familles, la moitié a encouragé trouvant que c’était une bonne idée et que cela peut servir dans la vie. Enfin, la direction nous a demandé de continuer cette année. Aussi, depuis la rentrée, nous avons repris la formation de 34 jeunes de cinquième. Nous rencontrons également chaque semaine des médiateurs de l’an dernier et des élèves de quatrième volontaires pour une formation qu’ils n’ont pu avoir l’année passée.

Key words

social violence, mediation, young person, school, school mediation


, France, Sarcelles

Comments

Si le bilan nous parait largement positif, nous n’avons pas la prétention de résoudre les problèmes des banlieues. Notre atelier se donne pour principal objectif de réguler les conflits essentiellement dans le cadre de l’école et ne donne pas de solution immédiate aux problèmes des agressions et du racket."

Notes

Contact : MIR, 114 bis rue de Vaugirard, 75006 Paris. Tel/fax 01 45 44 39 42.

Source

Articles and files

LIATARD, Brigitte; DIAZ, Elise in. Non violence actualité, 1994/12 (France), 186

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