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De l’intelligence sauvage

La médiation thérapeutique

Pierre Yves GUIHENEUF

04 / 1999

La démarche de Jean Ambrosi est basée sur deux postulats, résumés par Pierre Calame dans sa préface. D’abord, en matière de détresse psychologique et mentale, le patient est détenteur du savoir nécessaire pour retrouver l’équilibre, mais il ne l’utilise pas forcément, il faut par conséquent introduire une médiation qui lui permette d’accéder à ce savoir et de l’utiliser. Ensuite, le soignant ne peut se tenir à l’écart de son sujet ; au contraire, en poursuivant sa propre aventure personnelle, il introduit un lien de sympathie et une mise en résonnance respectueuse avec la personne soignée.

La condition préalable est que la personne se présente en médiation avec un but, qui est de ne plus souffrir, d’aller mieux, de se débarrasser d’un poids. Elle se rend rapidement compte que ce changement peut engendrer un bouleversement dans sa vie, avec son entourage. Le médiateur doit l’y préparer ou envisager avec elle s’il faut l’engager.

Mais le médiateur doit lui-même s’interroger sur son propre projet individuel. Mettre en évidence ce projet lui évite de se retrouver "envahi" par le projet de l’autre. Il se maintiendra de ce fait à une certaine distance respectueuse et aura la patience de laisser évoluer la personne à son rythme propre.

Le savoir de la personne est l’objet de la première attention du médiateur. Trois canaux permettent de l’exprimer : la parole, le corps, le rêve.

La parole exprime le savoir au sens premier, sans pour autant que la personne le reconnaisse elle-même. Le médiateur doit dialoguer sans courir après le sens premier ou le sens caché des mots énoncés. S’il y a sens, la personne saura, au moment venu, le révéler à elle-même. La personne aura utilisée cette circonstance pour s’entendre, pour trouver une réponse.

La façon que nous avons de traiter notre corps se manifeste dans notre hygiène, notre alimentation, notre respiration, notre activité physique. Elle se traduit également dans les positions corporelles et les gestes que nous adoptons communément, et qui expriment un contenu souvent très vaste. Une personne "déprimée" manifeste souvent un écrasement physique, marqué par un buste replié et des épaules rentrées. On peut dire que le savoir de cette personne pour accéder à un relatif mieux-être lui indique de se refermer sur elle-même, ce que traduit sa posture. La somatisation, c’est-à-dire l’inscription d’un conflit dans le corps, est également l’expression d’un savoir et la désignation d’un lieu à considérer pour que ce savoir s’exprime et soit entendu.

Le rêve a pour fonction d’orienter la personne à travers la mouvance du monde, de lui permettre de faire face aux situations nouvelles. En même temps, le rêve est porteur d’une indication dynamique, d’une cinétique. Les rêves répétitifs, dit récurrents, rapportent chaque fois les mêmes messages selon une cadence précise. Ils s’obstinent à transmettre un savoir qui s’exprime davantage dans la cinétique que dans le récit lui-même. Les enseignements qu’il communique peuvent être vérifiés, recoupés et finalement confirmés. En ce sens, le rêve récurrent est de première utilité pour identifier le bien-fondé du savoir.

Chaque situation est si particulière qu’il est difficile d’énoncer des "lois", même si certaines observations réalisées au terme de quinze années de pratique semblent dégager des constantes. Un vocabulaire trop arrêté risquerait de porter atteinte à la nécessaire disponibilité du médiateur et d’offrir un cadre trop restreint à la singularité de chaque personne. La médiation n’est pas une technique ou un art, elle est une sorte d’éthique, une façon de se disposer respectueusement à l’écoute de personnes, afin que leur dialogue interne puisse être relancé, que leur savoir se révèle à elles-mêmes et qu’elles puissent en disposer.

Key words

mediation, psychology, mental health, psychotherapy


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Cet ouvrage rapporte plusieurs exemples tirés de cas réels, dont l’un est décrit précisément. Il est suivi par un lexique, très détaillé et complet, du vocabulaire de la médiation.

Jean Ambrosi a été inspiré par la psychanalyse et ses diverses variantes, notamment la gestalt thérapie. Il a également trouvé, auprès de certaines pratiques animistes afro-brésiliennes, des intuitions voisines des siennes et une pratique en accord avec ces intuitions. Ce détour par des pratiques étrangères à notre propre culture l’a aidé à mettre en perspective ses propres interrogations.

Source

Book

AMBROSI, Jean, De l'intelligence sauvage : la médiation thérapeutique, Charles Léopold Mayer in. Dossier pour un débat, 1996 (France), n° 50

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