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Comment constructeurs équipementiers et fournisseurs travaillent ensemble à la conception d’un nouveau véhicule dans l’industrie automobile

Elisabeth BOURGUINAT

12 / 1999

Beaucoup de dirigeants prennent aujourd’hui conscience des limites de la compétitivité par la seule baisse des coûts. Le véritable défi consiste maintenant à améliorer sans cesse les processus d’innovation, notamment en impliquant dans la conception les acteurs les plus en amont, pour gagner à la fois en diversité de compétences mais aussi en cohérence du dispositif d’innovation et donc en création de valeur. Dans le secteur automobile, il s’agit pour le constructeur de développer des partenariats étroits avec les bureaux d’études des fournisseurs et des équipementiers. Mais comment organiser techniquement et juridiquement ce partage de la conception ?

Selon Mariella Remund, directeur marketing pour l’Europe de Dow Automotive, leader mondial dans le domaine des matières plastiques, les constructeurs choisissent souvent d’acheter à leurs fournisseurs des sous-ensembles complets, ce qui leur permet de se dispenser de certaines compétences spécialisées et donc d’abaisser leurs coûts ; mais ce dispositif rend le constructeur très dépendant du fournisseur et met en danger sa maîtrise du coeur de métier.

Une nouvelle démarche consiste à créer une véritable synergie entre le constructeur et les différents fournisseurs : non seulement on évite ainsi les redondances et les gaspillages, mais ces partenariats favorisent l’émergence de solutions inédites, grâce à la mise en commun des compétences complémentaires de chacun des partenaires.

Pour que cela fonctionne, chaque fournisseur doit se concentrer sur son domaine d’excellence : Dow Automotive s’est ainsi spécialisé notamment dans la planche de bord, pour laquelle l’entreprise dispose de compétences distinctives : la logique du moins disant cède ainsi le pas à celle du "plus qualifié".

Il est également essentiel de gérer le plus finement possible le partage des risques et des bénéfices de la nouveauté (Dow Automotive sait aujourd’hui les évaluer en valeur actualisée nette): dans certains cas, le constructeur rémunère les services d’ingénierie ou de recherche du fournisseur ; dans d’autres, il paie une redevance pour chaque planche de bord vendue. La condition fondamentale de réussite du partenariat à moyen et long terme est en effet qu’il s’agisse d’une relation gagnant-gagnant ; il est arrivé à M. Remund de refuser certains partenariats lorsque le constructeur ne paraissait pas vraiment décidé à s’engager dans une relation de ce type.

On passe ainsi d’un modèle de coopération séquentiel (le chimiste fournit la matière aux transformateurs, qui fournissent eux-mêmes les composants aux constructeurs)à différents modèles, dans lesquels soit le constructeur confie à l’équipementier la responsabilité de travailler avec le chimiste et achète des sous-systèmes complets (modèle intégré), soit le constructeur choisit le chimiste, gère l’ensemble du processus d’innovation et ne sélectionne l’équipementier que plus tard (modèle constructeur), soit les trois acteurs travaillent ensemble dès l’avant-projet (modèle concourant). Le fournisseur établit une "proposition de valeur" qui peut être adaptée en fonction des attentes du constructeur : les uns veulent externaliser certaines fonctions, d’autres sont dans une phase d’internalisation.

La confidentialité est assurée par une séparation stricte entre les équipes qui travaillent pour les différents constructeurs ; certains projets ont été refusés par Dow Automotive pour des raisons de déontologie : la société travaillait déjà sur un projet similaire avec un concurrent. Si l’un des partenaires veut, par la suite, réutiliser des technologies développées en commun, il devra payer aux autres des redevances. En revanche, lorsque la voiture arrive sur le marché, il est très difficile de protéger les inventions, puisque chacun peut la démonter et en reproduire la technologie ; la seule issue est de travailler sans attendre sur la génération suivante.

Les différentes formes de partenariat développées par Dow Automative lui ont permis de créer de nouvelles fonctions et d’éliminer 50 pour cent des pièces de la planche de bord, ce qui se traduit par une diminution du poids allant jusqu’à 5 kg, mais aussi par des réductions importantes de coûts d’outillage et d’assemblage. De plus, le processus de développement a été ramené à 30 mois au lieu de 36 à 48 mois dans les anciens dispositifs.

Pour mener ces évolutions à bien, l’équipe de M. Remund est désormais composée non seulement de chimistes, mais aussi d’ingénieurs spécialisés par domaine d’application ou type d’activité, et d’"account managers" qui assurent les relations commerciales ; au total, elle réunit 20 personnes de formations très variées et venant de 13 pays différents.

Key words

research, technological change, knowledge exchange, company, innovation, business management, industry, development history


, Europe

Comments

On pourrait trouver un rapport entre le développement de ces partenariats industriels et celui des mouvements de développement communautaire local et autres régies de quartier qui fleurissent un peu partout dans le monde (voir la fiche "Economie et solidarité : des solutions locales montrent la voie à suivre"): dans les deux cas, on substitue à un dispositif segmenté et séquentiel un système complexe d’interactions fortes et de synergie entre les différents partenaires. Dans le cas des régies de quartier, au lieu de partir du principe que les gens travaillent, puis paient des impôts, puis bénéficient du service public, puis se regroupent en association pour en dénoncer les dysfonctionnements, on réunit tous les acteurs concernés, de l’amont jusqu’à l’aval, pour qu’ils réfléchissent ensemble au meilleur usage des différentes ressources et compétences. Encore un effort : mettons en commun, pour une meilleure synergie, les innovations des constructeurs automobiles et celles des banlieues difficiles !

Source

Colloquium, conference, seminar,… report ; Articles and files

REMUND, Mariella, VERMEULEN, Franck, DREAN, Gérard, L'innovation en partenariat : comment un chimiste avec ses clients du secteur automobile - séminaire 'Ressources Technologiques' in. Les Annales de l'Ecole de Paris, 1998 (France), IV

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