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Les montréalaises se mobilisent et agissent pour la sécurité

Catherine RAFFIN DEWAELE

07 / 2001

La sécurité urbaine représente un des enjeux clés de l’égalité des femmes et des hommes. Dans de grandes villes nord-américaines, la majorité des femmes vivent au quotidien un sentiment d’insécurité. Elles limitent leurs déplacements et leurs activités par peur d’être agressées. Cette situation les rend particulièrement sensibles aux divers éléments de leur environnement qui contribuent à les insécuriser ou à les rassurer. L’expérience du quotidien les rend aptes à déceler les problèmes et apporter des solutions concrètes.

La ville de Montréal a répondu aux attentes des femmes dans ce domaine. En 1992, se crée un comité d’action femmes et sécurité urbaine qui initie plusieurs projets visant à promouvoir la sécurité et l’autonomie des femmes sur le territoire de la communauté urbaine de Montréal, en associant institutions et groupes communautaires. Trois territoires prioritaires d’actions sont retenus. En 1996, un "comité femmes et sécurité" est mis sur pied dans chacun des secteurs dont celui de La Petite Patrie. Pour un quartier plus sûr, ce comité femmes et sécurité, a développé de nombreuses actions, en matière d’aménagement sécuritaire notamment, avec méthode et pragmatisme.

Un mode d’organisation structuré, une stratégie d’action "multidimensionnelle"

Le comité femmes et sécurité de la Petite Patrie associe des partenaires institutionnels (ville de Montréal, police) et des associations (Tandem Montréal, Comité logement). Constatant qu’il ne va pas de soi de travailler ensemble, de définir les mandats de chacun des membres, un outil a été adapté pour animer les réflexions et les discussions. Les questions posées étaient par exemple "quelles sont, dans notre organisme, nos principales préoccupations par rapport à la sécurité des femmes ? Quelle est notre approche par rapport à la sécurité ? Quel est mon mandat pour faire partie du comité ? ". Le comité a pris le temps de définir un mode de gestion participatif et une philosophie commune d’intervention. Les concepts et facteurs reliés au sentiment d’insécurité ont par exemple été débattus. Le comité considère que " le sentiment d’insécurité des femmes est une réaction à la réalité diffuse et omniprésente du risque d’être victime d’actes d’agression. Ce sentiment est une conséquence directe de la violence faite aux femmes dans la société et est renforcé par les inégalités socio-économiques entre hommes et femmes. Il empêche les femmes de profiter pleinement et librement des activités et des services de la communauté par peur d’être agressées. Le postulat de base qui guide la planification et les interventions est que le sentiment d’insécurité devient un indicateur privilégié pour analyser et réaliser des projets". A la suite de la formation et de la consolidation du comité, sept groupes de discussion ont été mis en place afin de mieux connaître la réalité et les besoins des femmes du quartier en matière de sécurité dans les espaces publics. Puis un plan d’action a été défini comportant quatre volets : des activités auprès de la population (organisation de sessions d’autodéfense et rencontre d’informations, marches exploratoires ou visite critique des lieux, sensibilisation des hommes et des garçons, atelier dépannage pour la sécurité dans la maison ) ; des activités de "visibilité" (participation au conseil de quartier, rencontre avec les chefs de police ) et de "pression" (responsabilisation collective autour de projets d’aménagement) ; des activités de soutien ( "Montréal dit non à la violence", table de concertation jeunesse ) et enfin une activité de gestion du programme local. Le comité local a bien compris "la nécessité d’une stratégie multidimensionnelle pour travailler sur la problématique de l’insécurité des femmes". Les champs sont assez larges tout en ciblant certaines dimensions comme celle de l’aménagement sécuritaire.

Des principes d’aménagement sécuritaire

Les femmes ont défini six principes d’aménagement sécuritaire qui renvoient chacun à un comportement ou une action : la signalisation et l’orientation (savoir où l’on est et où l’on va), la visibilité (voir et être vu), l’achalandage (fréquenter des lieux animés), la surveillance formelle (obtenir du secours), l’aménagement et l’entretien (vivre dans un lieu propre et accueillant) et la mobilisation de la population (agir ensemble). Ces critères sont utilisés comme grille de lecture, pour faire l’analyse ou concevoir des aménagements urbains. Il s’avère plus facile de déterminer les causes de malaise dans un quartier, une rue et donc de poser des actions pour corriger la situation.

Ces principes ont d’abord été utilisés dans le cadre de marches exploratoires. Les marches se font en groupe dans des lieux précis. Les participantes observent le site en fonction d’une grille reprenant ces principaux principes d’aménagement sécuritaire. Les observations donnent lieu à des recommandations et sont transmises aux organismes responsables du site. Le groupe, en relation avec le Conseil de quartier, doit assurer le suivi des actions. Par exemple, les femmes de la Petite Patrie ont conduit une marche exploratoire sur le site d’un viaduc. Elles ont observé une absence de carte du quartier et préconisé d’en placer une aux extrémités nord et sud du viaduc. La végétation et une clôture nuisent à la visibilité près d’un stationnement. Les femmes recommandent de tailler les arbustes et d’enlever la clôture. L’expérience a montré que les recommandations, ont donné lieu à des transformations du site.

Par ailleurs, le comité de femmes de la Petite Patrie a participé activement au projet de réaménagement de la station de métro du quartier. Bien qu’ayant un projet en main, la société de transport de la communauté urbaine a accepté d’en discuter et de consulter. Le plan du projet d’aménagement initial de la station a été présenté au comité et aux habitants. Quatre rencontres ont été nécessaires et ont donné lieu en final à de nombreuses modifications des plans. Dans ce cas, il est important que la grille d’analyse des six principes d’aménagement soit prise en compte intégralement, sans retrait d’un paramètre. Une telle consultation a montré la nécessité de consacrer du temps et de développer des outils pédagogiques pour expliquer les projets d’aménagement aux citoyennes et aux citoyens.

Key words

public safety, woman, participation of women, participation of inhabitants, community participation, urban development planning, public area planning, mobilization of the inhabitants, urban neighbourhood, insecurity


, Canada, Québec, Montreal

Comments

Les interventions couvrant chacune plusieurs facettes de la violence faite aux femmes dans les lieux publics (sensibilisation, aménagement sécuritaire, autodéfense..) apparaissent comme des façons pertinentes de prévenir les agressions et d’accroître le sentiment de sécurité des femmes. En France, cette démarche de réduction des risques ou de prévention situationnelle commence à être connue des aménageurs et des chargés de la sécurité, sans être toutefois systématique. Elle associe encore peu les usagers au repérage des besoins et à la recherche de solutions. De plus l’approche des genres est rare. Autant de raisons de s’inspirer des principes et méthodes canadiennes.

Notes

Sources : Pour un quartier plus sûr, comité femmes et sécurité de la Petite patrie. Sophie Paquin, ville de Montréal, octobre 1998, 50 p.

Guide des femmes pour la sécurité des femmes en ville, Ville de Montréal, novembre 1993, 44 p.

Source

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