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Créer son entreprise pour créer son emploi ?

La création d’une entreprise apparaît, notamment du fait de la complexité administrative, comme un parcours du combattant, auquel la plupart des nouveaux chômeurs ne sont pas préparés, d’où des échecs trop nombreux pour qu’il puisse s’agir d’une solution pour l’emploi

Elisabeth BOURGUINAT

10 / 1998

En 1978, Raymond Barre fit scandale en déclarant : " les chômeurs n’ont qu’à créer leur entreprise " ; aujourd’hui, cette idée fait l’objet d’un large consensus. La création d’entreprise par les chômeurs apparaît souvent comme la réponse idéale à la montée du chômage et aux besoins de flexibilité des entreprises. Sylvie Chevrier, qui a mené, au sein du cabinet FVA Management, une large enquête sur les création d’entreprises, montre qu’en réalité on est loin des résultats escomptés.

Quelques histoires de réussites spectaculaires, celles par exemple de Steve Jobs, de Bill Gates ou du créateur de la puce électronique, masquent le nombre énorme d’échecs, et les difficultés redoutables qu’affrontent souvent ceux qui parviennent à faire survivre leur micro-entreprise. Après un an, environ 10

des nouvelles entreprises ont cessé leur activité, 35

après 3 ans et 50

après 5 ans. Seulement 20

des nouvelles entreprises sont des sociétés à fort développement bénéficiant d’un important capital de départ et employant plusieurs salariés ; dans les autres cas, il s’agit de toutes petites unités qui ne sont pas destinées à grandir.

En effet, 58

des créations concernent des entreprises individuelles, et ce taux passe à 68

lorsqu’il s’agit de chômeurs. Certes, les 300. 000 créations d’entreprises que l’on compte en France chaque année représentent près de 500. 000 emplois, et pèsent ainsi de façon non négligeable dans les chiffres du chômage. Mais il s’agit d’emplois malheureusement souvent provisoires, et qui en tout état de cause ne produisent pas l’effet " boule de neige " escompté, la plupart de ces entreprises restant individuelles même lorsqu’elles parviennent à un certain résultat (83

des entreprises individuelles le sont toujours après 2 ans d’existence). On peut donc parler de recomposition du tissu social, puisque d’anciens salariés se mettent à leur compte, mais pas de développement de l’emploi.

Ces difficultés et ces échecs s’expliquent par plusieurs facteurs. Les partenaires de l’aide à la création d’entreprises soulignent tout d’abord que les créateurs sous-estiment largement la nécessité d’évaluer le marché. Dans l’ordre de leurs préoccupations, la recherche de fonds vient en premier, puis le choix de la structure juridique, et enfin seulement la démarche commerciale, alors que c’est cette dernière qui détermine la viabilité de l’entreprise à terme.

Le deuxième facteur est la difficulté de trouver des fonds : trop souvent, l’évaluation des besoins en capitaux ne tient pas compte du temps de montée en charge de l’activité, si bien que le décalage entre le prévisionnel et le réalisé est souvent de 50

au bout de la première année. Bien entendu, les banques sont très réticentes à prêter des fonds à ces entreprises de petite taille, dont l’avenir est de surcroît incertain.

Le troisième facteur est la complexité des obligations administratives auxquelles l’entreprise doit faire face. Le langage administratif, pétri de formules compliquées, n’est pas accessible aux personnes les moins qualifiées, qui sont aussi celles qui, exclues du monde compétitif du salariat, créent leur entreprise pour survivre.

Pour résoudre ces difficultés, les aides à la création d’entreprise sont nombreuses et variées : certaines sont attribuées en fonction du profil du créateur (handicapé, jeune...), d’autres en fonction des régions (primes des conseils régionaux), du type de projet (aide à l’embauche, aide à la recherche...), etc. On estime qu’il existe environ 800 textes législatifs concernant l’aide à la création d’entreprise, et là encore, les créateurs d’entreprise éprouvent des difficultés à accéder à l’information pertinente. Sur le plan du conseil en création d’entreprise, les aides les plus efficaces sont celles qui procèdent d’une approche globale, et travaillent par exemple, très en amont du lancement de l’activité, sur l’existence de débouchés commerciaux, mais aussi sur un bilan personnel du porteur de projet, visant à vérifier sa détermination ainsi que ses capacités à mener à bien son entreprise.

Mais même en cas d’encadrement très serré, la réussite n’est pas garantie : la création d’une entreprise n’est pas une solution miracle à la portée de tous ; nombre de créateurs au projet incertain cessent leur activité plus désabusés et parfois beaucoup plus lourdement endettés qu’avant leur tentative.

Palabras claves

empresa, creación de empresa, empleo, lucha contra el desempleo, parado, administración pública, fracaso


, Francia

Comentarios

Sylvie Chevrier parle de " situation kafkaïenne " à propos de la complexité des démarches administratives nécessaires pour créer et pour faire vivre une entreprise : " l’Administration crée des dispositifs pour aider les usagers à faire face à la complexité qu’elle a elle-même engendrée ". Lors d’une récente soirée des " Invités de l’Ecole de Paris ", Michel Rocard expliquait qu’il s’est efforcé, lorsqu’il était aux affaires, d’instaurer le principe du guichet unique (fiscal et social)pour les entreprises de moins de 10 personnes ; s’il a échoué, c’est que toute simplification mettrait en péril quelques-uns des 1. 500 formulaires administratifs qui circulent dans notre pays, chacun d’eux relevant d’une administration particulière, qui se mettrait nécessairement en grève à la moindre menace de suppression de poste...

Pourtant le principe selon lequel " nul n’est censé ignorer la loi " ne devient-il pas caduc lorsque la loi a atteint un tel degré de complexité que même des experts s’y perdent ? Le paradoxe est que cette complexité ne vaut pas seulement pour les contraintes qui pèsent sur les entreprises, mais aussi pour les aides qui leur sont apportées, et dont la jungle paraît tout aussi impénétrable. On a ainsi le sentiment d’une véritable incompréhension, de la part de l’administration, de ce qu’est la vie d’une entreprise, des conditions de sa survie et de son développement.

Fuente

Actas de coloquio, encuentro, seminario,…

CHEVRIER,Sylvie, Ecole de Paris de Management, Créer son entreprise pour créer son emploi ? , Association des Amis de l in. Les Annales de l'Ecole de Paris, 1997 (France), III

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