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Les attitudes des ONG vis-à-vis des organisations paysannes (Bissi, Tchad)

Le regard d’un cadre d’une ONG du Sud sur les façons d’être des agents des ONG

Pierre PAZIMI, Benoît LECOMTE

06 / 1999

Pierre Maney PAZIMI voudrait faire passer ce message :

"Le plus souvent, les ONG quand elles veulent aider une organisation paysanne (OP), se basent sur les faiblesses de celle-ci ; elles disent : "De quoi vous avez besoin, qu’est-ce qui vous manque ?" Ainsi de suite, mais elles ne cherchent pas ce que l’OP a comme richesses. C’est une façon de créer un complexe d’infériorité chez les paysans. Chercher d’abord ses faiblesses, ses torts, pour après proposer des solutions, qui généralement ne sont pas les solutions des paysans mais celles de ceux qui "voient le problème". Or, ne pourrait-on plutôt chercher auprès des paysans, comment ils sont construits, quelles sont leurs forces ? Et après chercher, ce qui leur manque pour que ces forces là, soient complètes.

Il n’y a pas une ONG qui échappe à cela, toujours leur première question est : "Qu’est-ce que vous avez comme problèmes ? " On fait la liste de tous les problèmes et après ils disent : "Est-ce que vous avez besoin de solutions ?" Et de toute façon, ils ont déjà la solution à proposer. Alors ils disent : "Si vous faites cela, c’est la solution à vos problèmes" et ainsi de suite.

C’est le reproche que l’on peut faire aux ONG : elles croient que les solutions c’est eux qui les ont et que les autres n’ont rien à y voir. J’ai beaucoup regretté (alors que moi-même je suis membre du personnel d’une ONG d’appui) qu’on amène des solutions comme si les problèmes ont toujours existé. Et même certains problèmes n’existent pas, mais on a des solutions !

Je regrette aussi ceci : le plus souvent, on fait au niveau des ministères ou au niveau des ONG des projets agricoles à la place des paysans. On dit : "On va faire ceci, on va faire telle chose", mais cela veut dire quoi pour les gens ? C’est pourquoi, je dis que tant que les paysans n’arrivent pas à avoir leur place au niveau national dans les discussions face à l’Etat et aux ONG, on peut bien parler de choses intéressantes, mais les actions ne peuvent pas avoir de conséquences positives dans les exploitations. C’est très dommage. Parfois, on a des discussions très chaudes avec les services d’état et certaines ONG sur ces aspects là. Je pense que petit à petit, s’il y a des organisations paysannes bien formées et qui commencent à prendre au sérieux la chose, je pense que cela va avancer.

Je peux donner un ou deux exemples. Dans les années 1984/85, une ONG du Nord voulait acheter des céréales. De son côté l’OP de Bissi Mafou avait mis en place le système des marchés de céréales par secteur. L’ONG a trouvé cela très intéressant : ils ont dit : "Nous allons vous acheter plusieurs tonnes de céréales pour envoyer ailleurs". Et nous, on a organisé les achats et les gens ont mis les céréales sur le marché. Puis cette ONG nous a écrit pour dire : "Non, nous notre philosophie ne nous permet pas d’acheter les céréales dans un pays et de les donner à l’intérieur du même pays". Alors ils ont refusé d’acheter les céréales des tchadiens pour les besoins des tchadiens et ils sont partis acheter au Sénégal pour acheter pour les tchadiens. Alors on s’est posé la question : "Pourquoi, ils ne pouvaient pas acheter les céréales des tchadiens pour le Sénégal ?" Cela a été l’erreur la plus grave que nous on a connue. Et c’est pourquoi dès ce moment dans l’OP de Bissi, nous avons dit : "Il ne faut pas compter sur les ONG, ni forcément travailler avec elles ; seulement si on en a besoin on le refera mais sinon ce n’est pas la peine."

Une autre bêtise : une ONG voulait aider les gens à faire des puits. Dans un village, ils ont créé 7 puits et nous, nous leur avons dit : "Sept puits, ce n’est pas possible dans un petit village !" Au bout de deux ans, les 7 puits étaient secs. Si l’ONG avait été sérieuse, elle aurait pu d’abord discuter avec nous pour chercher les causes de ces problèmes d’eau. On a essayé de récupérer le problème, on a réfléchi avec les villageois qui finalement ont dit que :"Dans le temps il y avait beaucoup d’arbres et maintenant il n’y a plus rien". Et les gens ont commencé à replanter des arbres. Sur les 7 puits ils ont pu en récupérer 3 où l’eau est revenue en permanence.

Par contre, avec certaines ONG, il y a eu des réussites, par exemple dans la sécurité alimentaire. Pendant plusieurs années les gens ont travaillé pour garantir leur sécurité alimentaire par leur propre production et par le stockage de leurs propres céréales et pour aider tout le monde à se nourrir. Et puis plus tard, une ONG Terre des Hommes France a coopéré pendant plusieurs années avec l’OP de Bissi Mafou. Aujourd’hui on ne travaille plus avec eux parce qu’ils ont dit : "Maintenant vous êtes arrivés à une autonomie suffisante et nous pouvons aller ailleurs". Et là aussi, nous avons été d’accord avec Terre des Hommes. Ils nous avaient aidés à mettre en place des bâtiments pour le stockage. Parce qu’on a dit : "Pour garantir le stockage de longue durée, il faut quand même des lieux de stockage assez conséquents, propres, et en dur pour éviter des dégâts". Ce qui fait qu’au Tchad, l’Organisation Paysanne de Bissi Mafou est la première et plus importante organisation qui a su mettre en place une sécurité alimentaire durable."

Palabras claves

organización campesina, ONG del Norte, conflicto, dependencia económica, desarrollo local, estrategia de desarrollo


, Chad, Pala

Comentarios

A travers deux exemples d’échec et un de réussite de collaboration entre une fédération d’Organisations Paysannes et diverses ONG du Nord, notre interlocuteur fait bien percevoir deux défauts de ces dernières : ne voir que ce qui manque et pas ce qui se fait et débarquer avec des idées préconçues ou bardées de principes.

Notas

Notre interlocuteur est un agronome responsable de activités dans le domaine agricole d’une ONG tchadienne. En même temps il est paysan et fait partie de l’organisation paysanne qu’il décrit et qui agit dans la zone dont il est originaire. Plusieurs fiches ont été établies à partir de l’interview.

Entretien avec PAZIMI, Pierre réalisé à Pala en juin 1999.

Fuente

Entrevista

LECOMTE, Benoît.

GRAD (Groupe de Réalisations et d’Animations pour le Développement) - 228 rue du Manet, 74130 Bonneville, FRANCE - Tel 33(0)4 50 97 08 85 - Fax 33(0) 450 25 69 81 - Francia - www.grad-france.org - grad.fr (@) grad-france.org

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