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Organisation des travaux hydrauliques et gestion de l’eau après les réformes économiques en Chine : exemple de deux districts du Anhui (Centre Est du pays)

Sylvie DIDERON

04 / 1993

Avec les réformes économiques du début des années 1980 en Chine, les collectivités locales ont perdu un grand nombre de leurs fonctions antérieures. Ceci a des conséquences importantes dans le domaine de la gestion des infrastructures hydrauliques.

1. A Bozhou, le très ancien système de drainage est la base des cultures pluviales. Après la décollectivisation en 1982, la production agricole a augmenté de façon spectaculaire. La production totale de grains a doublé en 5 ans. Ce n’est que 7 à 8 ans plus tard que, devant les premiers signes de faiblesse du réseau de drainage, le signal d’alarme a été sonné. Les inondations devenaient de plus en plus fréquentes après les fortes pluies d’été, l’envasement des canaux étant responsable du mauvais écoulement des eaux. Or, les travaux d’hiver obligatoires pour l’amélioration et l’entretien des infrastructures hydrauliques avaient été supprimés depuis 1982. Ils étaient, pendant la collectivisation, organisés hors des périodes de pointe de travail agricole par les différents échelons de la pyramide administrative suivant l’importance des constructions entreprises. Les cadres de ces différents échelons étaient chargés de répartir les tâches parmi les échelons inférieurs, et ceci jusqu’au chef d’équipe (les hameaux actuels, soit l’unité de base d’organisation de la production agricole à l’époque, comprenant 100 à 200 personnes). Ce dernier distribuait finalement la besogne aux familles d’agriculteurs.

Depuis les années 1987/88, en réaction au problème de maintenance des infrastructures, la main-d’oeuvre paysanne est de nouveau sollicitée l’hiver. Les travaux se limitent au curage et à l’entretien des canaux déjà existants.

2. Or, de grands travaux d’aménagement avaient été entrepris pendant la collectivisation entre 1958 et 1961 puis continués pendant les années 1970. Il s’agissait d’améliorer le réseau de drainage et de le rendre utilisable pour l’irrigation. Cependant, ces aménagements à long terme n’étaient pas achevés au moment des réformes. En 1988, après un arrêt de près de 10 ans, les constructions ont donc repris. Durant l’hiver 1990/91, commence le creusement de canaux d’irrigation surrélevés qui viennent doubler les canaux de drainage. Pourtant, dès le printemps suivant, ils sont occupés par des cultures! Les familles n’ont pas les moyens d’acquérir les pompes qui permettraient d’élever l’eau dans ces nouveaux canaux pour qu’elle s’écoule vers les parcelles.

3. Parfois, on assiste à la destruction des anciens équipements faute d’entretien. C’est le cas à Bozhou des puissantes pompes installées le long de la rivière principale et destinées à approvisionner en eau les terres avoisinnantes en cas de sécheresse. La plupart n’ont servi qu’une à deux fois en plus de quinze ans d’existence. Ces aménagements demeurent largement sous-employés.

Faute de moyens et d’entente au sein des villages, le même scénario se reproduit pour les petites motopompes datant de la collectivisation. Achetées par les équipes ou les brigades à l’époque, elles ne sont plus prises en charge par les autorités locales. Ici, le fil électrique a été volé et les villageois ne se sont pas entendus pour en acheter un autre; là, la pompe a rendu l’âme depuis longtemps sans être remplacée.

4. A Tianchang, en zone rizicole, les choses se passent un peu différemment. Après les réformes a subsisté une organisation commune au sein des hameaux (anciennes équipes de production). La période de mise en eau des rizières et de repiquage est très limitée. Or, les réserves en eau sont peu abondantes. Afin de gérer au plus juste ces réserves limitées dans un temps limité pour des travaux très exigeants en main-d’oeuvre, les assolements, la mise en eau des rizières et le repiquage sont organisés au niveau de l’équipe. Une des raisons pour lesquelles l’entretien du réseau hydraulique est plus efficace ici qu’à Bozhou est que son fonctionnement conditionne la production. Alors qu’à Bozhou, si le drainage est essentiel, l’irrigation n’est que d’appoint.

Mots-clés

agriculture, aménagement du territoire, réforme agraire, organisation paysanne, hydraulique, irrigation, organisation communautaire, paysan, politique agricole, système de production


, Asie, Chine, Anhui

Commentaire

Réformistes-conservateurs: le débat en Chine n’est pas seulement idéologique et n’a pas seulement lieu dans la capitale. Le système collectif ("conservateurs" ici)bloquait toute initiative privée mais a permis la mobilisation des énergies nécessaires à la réalisation d’immenses investissements (hydraulique). Le système "réformé" a permis, grâce à l’encouragement de l’initiative individuelle, de tirer partie de ces investissements passés. Cependant, il se révèle parfois très difficilement capable -voire incapable- de poursuivre ces investissements ni de les entretenir.

Notes

Ma thèse (Institut National Agronomique Paris-Grignon; en cours)résulte d’un travail de recherche de terrain, d’observations et d’enquêtes menées auprès des acteurs de l’agriculture locaux: paysans, cadres,...dans plusieurs districts chinois.

Source

Thèse et mémoire

DIDERON, Sylvie, INSTITUT NATIONAL AGRONOMIQUE PARIS-GRIGNON, 1993/00/00 (Suisse)

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