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Mise en place d’une échoppe communautaire au sein d’un village des Andes équatoriennes

Nadia CHALABI

08 / 1996

San José de Saloya est une communauté rurale équatorienne comprenant 16 familles pour lesquelles la principale activité économique est celle de journaliers dans le secteur du bois. De 1988 à 1993, ce village a été l’un des sites d’intervention de ANDES, programme de développement alimentaire (1).

Une échoppe communautaire en réponse aux difficultés d’achat de vivres ?

Au cours des diagnostics lors des assemblées villageoises, différents problèmes ont été évoqués, parmi lesquels l’achat de produits alimentaires. Dans le bourg le plus proche, San Miguel de Los Bancos, les prix sont élevés et l’accès est rendu difficile suite à la fermeture du tronçon routier. Les familles ont donc proposé de mettre en place une échoppe communautaire.

Cadre organisationnel

L’organisation d’une échoppe repose sur sa reconnaissance officielle par les autorités. Le fait que la zone de San José de Saloya dispose d’un comité déjà inscrit au Ministère du bien-être social a permis de compter sur une plus grande participation formelle des villageois. Le soutien de l’équipe de ANDES a écourté les démarches administratives (6 mois au lieu de un an)pour obtenir l’aval des autorités. Les modalités de gestion de l’échoppe ont été définies par les différents partenaires. Le Comité de la communauté prend en charge la direction et l’administration de l’échoppe, mais délègue les aspects pratiques à une famille expérimentée dans ce type d’activité. Cette dernière résidant à proximité de la route a aménagé l’échoppe près de sa maison ; ainsi ce magasin bénéficie d’un site facilement accessible et surveillé en permanence par la famille qui peut proposer des horaires d’ouverture étendus. Le père de famille se charge des achats et du transport des marchandises, son épouse de la vente et de la comptabilité. Un ingénieur agronome de ANDES joue le rôle de conseil pour les problèmes de gestion.

Mise en route de l’activité

L’échoppe a donc été construite grâce à des mingas (travaux collectifs), les matériaux et le terrain étant fournis par la famille concessionnaire. D’après les professionnels de ANDES et pour répondre aux objectifs du projet, l’échoppe ne devait vendre aucun aliment vide sur le plan nutritionnel ni dangereux sur le plan de la santé comme friandises, allumettes, boissons alcoolisées ou cigarettes. Mais la communauté s’y est opposée: ce sont grâce à ces aliments que s’effectuent les bénéfices et si la population ne peut se les procurer sur place, elle se rendra à Los Bancos où il est probable qu’elle y réalisera tous ses achats. On se trouvait devant un dilemne entre arguments sanitaires et éducatifs d’une part, aspects pratiques et modes de vie d’autre part, mais ces derniers l’ont emporté... Le premier achat a eu lieu dans une grande ville commerçante aux prix avantageux, en quantité calculée sur la base de la consommation journalière par famille multipliée par le nombre de familles et par 30 jours. Un prêt accordé par ANDES a permis de couvrir les frais des premiers achats et d’apporter l’assistance technique nécessaire. L’ouverture de l’échoppe a été retardée de 5 mois, et finalement de 10 mois, à cause des discussions intra-communautaires relatives à des décisions de gestion, et à la vérification des coûts des marchandises.

Evaluation

Après l’ouverture, l’échoppe n’a pas pu faire face à l’affluence de la clientèle beaucoup plus importante que prévu. Tous ont réalisé leurs achats pour le mois et la plupart à crédit. Ainsi la faiblesse de l’investissement initial par rapport aux besoins alimentaires des familles, et l’absence d’un système de crédit efficace ont empêché l’échoppe, dans la première phase de son activité, de surmonter la concurrence avec les commerces de Los Bancos. Mais actuellement, ce système fonctionne de façon continue, et on ne relève pas de pertes financières apparentes. Au bout de 9 mois d’activité, l’analyse des premiers bilans comptables montre une augmentation des achats grâce à une plus grande disponibilité d’argent. Le réapprovisionnement se fait grâce aux ventes et aux bénéfices. Le salaire de la gérante et les frais de transport sont couverts. Toutes les communautés situées au-dessus de San José de Saloya peuvent s’approvisionner à l’échoppe, ce qui leur évite 10 km de marche.

Quelle évolution ?

A long terme, la divergence d’objectifs entre l’équipe de ANDES et la communauté s’est accrue. ANDES souhaitait diversifier l’offre avec des produits carnés et le comité villageois augmenter l’offre en produits existant déjà et nouveaux (bouteilles de gaz par exemple)afin que l’échoppe devienne un centre incontournable d’approvisionnement local. Une fois de plus, l’avis des villageois a prévalu, avec l’octroi conséquente d’un prêt sans intérêt. Comme le souligne l’auteur "ces contradictions ne doivent pas faire peur car... contrairement aux apparences, un total accord imposé conduit à l’échec et à la rupture." A l’heure actuelle, l’échoppe est totalement gérée par la communauté, sans aide financière extérieure.

Mots-clés

commerce, statut juridique, commercialisation, accès au crédit, organisation communautaire, travail communautaire, marché local, consommation, consommateur, crédit, création d’emploi, service de proximité, nutrition, équipement collectif, technicien et paysan, approvisionnement alimentaire


, Équateur

Commentaire

Cette initiative de commercialisation reflète l’importance de la prise en compte des comportements d’achat et des modes de consommation de la clientèle visée pour conquérir le marché. Elle témoigne aussi de la nécessité de prévoir non seulement le capital nécessaire au démarrage d’une activité économique, mais aussi un fonds de roulement suffisant pour faire crédit aux familles et surmonter les écarts de calendrier entre les sorties et les rentrées d’argent.

Notes

(1)ANDES= Alimentación, Nutrición y Desarrollo (Alimentation, Nutrition et Développement)

Principaux partenaires du projet:

- Facultés des Sciences médicales et des Sciences agronomiques de l’Université Centrale de Quito (UNC), EQUATEUR

- Instituto Juan César Garcia(spécialisé en sciences sociales et de la santé), Casilla postal 17-11-6292,Quito, EQUATEUR/Tel 593 (2)455 797 Fax 593 (2)464 412; E-mail : admin@ijuga.ecx.ec

- CIE= CentreInternational de l’Enfance, Château de Longchamp, 75016 Paris, FRANCE/Tel (33)1 44 30 20 00 Fax (33)1 45 25 7367

Source

Articles et dossiers

SALAZAR, Fernando, ANDES, Alimentation, nutrition, développement en Equateur. Des micro-entreprises : l'échoppe communautaire, CIE in. L'enfant en milieu tropical, 1995 (France), 200-221

ALTERSYAL (Alternatives Technologiques et Recherche en Systèmes Alimentaires) - Coronado, San José, COSTA RICA c/o CIRAD-SAR, 73 rue J.F.Breton - BP 5035- 34032 Montpellier cedex 1. FRANCE - Tél. 04 67 61 57 01 - Fax 04 67 61 12 23

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