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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

L’honneur des pauvres

Valeurs et stratégies des populations dominées à l’heure de la mondialisation

J.P. TRANCHANT

07 / 1998

Avant dix ans la moitié de la population mondiale vivra dans les agglomérations et 90 % des pauvres absolus seront des citadins. La déclaration de Caracas suite à une rencontre internationale sur la réhabilitation des quartiers précaires autoconstruits formule les attentes des « gens de rien » qui vivent dans les bidons villes:

- le renforcement des dynamiques à l’oeuvre dans les quartiers d’habitat précaire passe par la consolidation de la situation foncière des habitants.

- toute politique en faveur de l’habitat précaire doit appuyer les projets des habitants, et non les faire participer à des projets conçus en dehors d’eux.

- à l’échelle des quartiers, il faut procéder par des dotations globales concernant les financements, afin de permettre des arbitrages entre priorités par les habitants eux-mêmes.

- l’équilibre entre le financement du logement des classes moyennes et l’amélioration de la situation urbaine des populations défavorisées est révélateur des choix macro-économiques d’un pays.

- Les rythmes sociaux et les rythmes administratifs et politiques ne sont pas synchrones. Ainsi il y a des temps courts de la réponse à l’urgence et les temps longs d’une maturation des projets, d’une consolidation des organisations, de la transformation progressive des quartiers.

De même en milieu rural, il faut partir du concret et accompagner ce qui existe tout en respectant une certaine lenteur inhérente à l’écoute, au dialogue et à l’interpellation.

Le métissage actuel qui affecte toutes les sociétés du globe est un enrichissement de l’humanité dans son ensemble et une composante fondatrice de la diversité. Mais vivre la diversité dans la paix amène à surmonter une contradiction: car d’une part, nier la culture c’est l’échec du développement, donc de la paix, et d’autre part parler de culture c’est mettre en valeur ce qui désuni, donc c’est la guerre. De nombreux mouvements cherchent à relativiser la civilisation occidentale et à affirmer leur propre culture. Pour eux, l’individualisme est sans issue à long terme. Il faut chercher une autre voie dans le renforcement des communautés locales, la revivification de leurs pratiques et donner priorité à la culture sur la civilisation. Dans certains pays comme au Pérou ou au Sri Lanka des revendications idéologiques mais aussi culturelles ont débouché sur des conflits ayant fait des dizaines de milliers de victimes.

Le futur est à inventer entre la pensée concrète, sauvage et systémique des petits groupes, et la pensée abstraite, savante, analytique et sectorielle des grands systèmes. Seule une pensée concrète comme celle des communautés paysannes du Pérou, de Tanzanie, d’Inde ou de Thaïlande peut embrasser la diversité du monde à travers le jeu des relations existant entre celui-ci et les êtres vivants. A l’inverse, l’analyse sectorielle de la diversité qui fonde l’économisme s’oppose à la saisie de la globalité. Parce qu’elle donne plus d’importance aux choses qu’aux relations, elle ne peut accéder qu’à des totalités juxtaposées où sont en germe tous les totalitarismes de l’argent, de la race, de l’Etat ou du prolétariat. L’avenir se trouve donc dans le principe vital de complémentarité entre le yin et le yang, il se trouve dans l’union des contraires demeurée vivace dans la pensée des sociétés traditionnelles, cette pensée concrète qui existait encore dans l’Europe du Moyen-Age et que l’Occident a perdu de vue.

L’humanité va devoir entreprendre une révolution spirituelle, intellectuelle et institutionnelle de grande ampleur. Il convient donc dans l’immédiat, et dès aujourd’hui, de relever à travers le monde tous les signes d’une volonté de réforme, de les encourager et de les relier entre eux pour faire d’avancées locales limitées et dispersées, les premiers éléments d’une mise en mouvement à l’échelle planétaire. Pour se faire, des équipes de deux messagers partiraient en reconnaissance dans chaque continent. Ces messagers organiseraient des rencontres d’échange au niveau local et régional, puis passeraient le relais à des institutions afin de transformer des initiatives locales innovantes en programmes politiques continentaux ou mondiaux

Mots-clés

pauvreté, droit au logement, ville, exclusion urbaine, participation des habitants, consultation des habitants, quartier urbain, politique foncière, financement, culture et développement, paix, pluralisme culturel, diversité culturelle, tradition et modernité

Commentaire

Ce dossier est illustré de nombreux et pertinents témoignages d’acteurs de terrain. L’analyse est teintée d’indigénisme, ainsi la responsabilité des minorités privilégiées dans la situation des pays du Sud est totalement occultée.

Source

Livre

CANNAT, Noël, L’honneur des pauvresValeurs et stratégies des populations dominées à l’heure de la mondialisation, FPH in. Dossier pour un débat, 1997 (France), n° 77

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