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Cameroun : l’aide alimentaire et le développement

Pierre Yves GUIHENEUF

04 / 1997

A le regarder en profondeur, le Cameroun apparaît comme une somme de diversités. On dit de lui qu’il est un résumé de l’Afrique, avec plus de 200 groupes ethniques et cinq grandes zones agro-écologiques. En dehors de la région soudano-sahélienne, elles offrent toutes de bonnes perspectives en matière de production agro-pastorale et même piscicole. Mais malgré ses énormes potentialités de production agricole et la diversité de ses milieux, le Cameroun reste confronté à des problèmes qui fragilisent constamment sa situation alimentaire. On peut citer entre autres :

- l’insuffisance des mécanismes, structures et moyens d’accompagnement et de promotion des agricultures : recherche, circuits d’approvisionnement en intrants, accès au crédit, implication des producteurs dans les filières par produit, etc.

- les pratiques culturales rudimentaires dans le domaine du vivrier ;

- la fragilité des organisations paysannes, qui sont apparues depuis 1989 ;

- la concurrence des produits importés (riz, maïs, huile, lait, oignons...)et le fait que la crise économique et la dévaluation du franc CFà aient créé des problèmes d’approvisionnement alimentaire pour les couches urbaines moyennes et défavorisées ;

- le réseau de distribution (transport, communication, institutions appropriées)encore inadéquat et qui participe à l’augmentation des coûts.

En matière de stratégie alimentaire, les pouvoirs publics exercent leur politique dans trois domaines.

Le premier est celui de l’amélioration de l’offre : modernisation de la production et commercialisation des denrées. à ce niveau, on observe actuellement un désengagement de l’État, qui laisse la place aux opérateurs privés, organisations paysannes et ONG d’appui. La tendance est la même dans le domaine des voies de communication, où l’État est remplacé par les municipalités.

Le second domaine d’intervention est celui de l’accroissement de la demande, que l’État modifie grâce à des programmes d’éducation nutritionnelle et tente de rendre solvable grâce à la création d’emplois et à l’augmentation du pouvoir d’achat des urbains.

Enfin, le troisième domaine concerne la planification, l’information et la coordination, à l’instar du Système d’alerte rapide [de prévision des situations de pénurie]mis en place par le ministère de l’Agriculture.

Mais l’action gouvernementale est confrontée à de nombreuses difficultés contextuelles, notamment :

- son discours de désengagement sur les grands domaines de la production d’intrants, pesticides, libéralisation, etc ;

- la baisse considérable de salaires et la fermeture des plusieurs entreprises publiques et privées mettant les employés au chômage ;

- le manque d’une politique viable de protection du producteur face aux rouages du marché et aux tracasseries policières ;

- le manque de moyens d’organisation et de renforcement des filières de produits vitaux à même d’assurer une plus grande sécurité alimentaire ;

- le manque de politique incitative et de circuits stables de distribution nationale des produits ;

Notre regard de la situation globale sur les acteurs de terrain laisse entrevoir une sous-exploitation du potentiel réel du pays. à chaque fois qu’il y a eu aide alimentaire, qu’a-t-on apporté aux populations locales ? Des produits nationaux et en quelles quantités ? Des produits importés, lesquels et en quelles quantités ? Qu’est-ce qui est fait pour développer des filières solides de vivriers et assurer leur bonne répartition locale et nationale, sous-régionale et continentale ?

Nous ne pouvons que lancer un cri d’alarme afin qu’une mobilisation plus effective soit engagée avec le concours de toutes les personnes concernées au Cameroun et dans tous les pays africains. Cette mobilisation devrait se matérialiser à travers :

- la mise en place de véritables cadres d’observation pour la collecte des données agro-économiques et commerciales permettant un accès plus facile à l’information ;

- la démocratisation de la production et du commerce sur le plan international, par la décentralisation des facteurs de modernisation de la production et par la limitation des points frontaliers dans ce domaine ;

- la promotion et l’appui aux organisations de producteurs et d’opérateurs commerciaux ;

- le renforcement des filières de produits de rente et vivriers ;

- l’amélioration des voies de collecte, l’organisation de la distribution et la libre circulation des produits sur le plan national ;

- le développement d’une politique de valorisation du potentiel interne par la protection des produits locaux par rapport aux produits d’importation ;

- le développement d’une culture de consommation locale auprès des populations.

Mots-clés

agriculture et alimentation, agriculture, agriculture paysanne, alimentation, souveraineté alimentaire, stratégie alimentaire, aide alimentaire, développement rural


, Cameroun

Notes

Ce texte fait partie d’une série de cas portant sur la question de la sécurité alimentaire, recueillis parmi les membres du réseau Agriculture paysanne et modernisation (APM)lors de la rencontre de Yaoundé, en septembre 1996. Une version complète de cet article est disponible en version française auprès du secrétariat APM Afrique(BP 10008, Yaoundé, Cameroun).

Source

Littérature grise

AKOA, Albert Anicet, Note de travail pour le réseau APM, 1997 (France)

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