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L’entreprise privée passe mal au village

En Guinée, une entreprise malaisienne se heurte à l’opposition des villageois habitués aux sociétés d’Etat

Marie Agnès LEPLAIDEUR

02 / 1999

Bernas, une société détenue à 80% par les Malaisiens et à 20% par l’Etat guinéen exploite depuis 1997 un domaine rizicole aménagé par les Soviétiques dans la plaine de Mochon. Ses relations avec la population locale sont très tendues car les villageois ne comprennent pas la manière de fonctionner de cette entreprise privée que résume un responsable de la société : "Nous n’investissons que lorsque l’action est rentable et surtout conforme aux clauses passées avec l’Etat. Tout ce que nous devons faire envers des tiers sera fait sous forme de prestations de services". Une nette différence avec les sociétés d’Etat et les projets "qui constituaient de véritables vaches laitières où on se servait au lieu de servir", explique un cadre du ministère de l’Agriculture qui poursuit "dans un projet avec une part de budget national, on peut se permettre d’improviser et même de gaspiller. Tel n’est pas le cas dans une société privée".

Plusieurs griefs sont faits par les villageois à Bernas. Ils sont révélateurs de ces incompréhensions : "Comment voulez-vous que des sous-développés comme nous viennent faire un miracle dans ce pays ?", "Ces Malaisiens ne font rien pour améliorer nos conditions de vie". Les villageois reprochent en effet à la société d’employer peu de monde (18 permanents et des temporaires en cas de besoin)et de n’avoir pas construit d’infrastructures (écoles, mosquées, dispensaires, églises)et de ne pas avoir désenclavé les villages riverains.

En outre, Bernas ne laboure pas gratuitement les champs des paysans avec leurs machines et leur facture la journée de travail à 25 000 Fg.

"Tellement ils sont méchants, ils nous refusent même les rebuts de récolte !", se plaint un agriculteur. De fait la société a interdit leur ramassage cette année car l’an passé elle a perdu 400 t de riz sur une production de 1600 t, les paysans se servant largement dans les champs non récoltés au lieu de se contenter des résidus. Conclusion des gens du pays : "Ils ne nous aiment pas donc il ne faudrait pas qu’ils exploitent les plaines de nos parents".

Leur mécontentement est tel que la société a dû rétrocéder un tiers des 1800 ha qui leur avaient été attribués et arrêter ses travaux plusieurs jours suite à une grève des employés. Elle se demande même si elle ne va pas transférer une partie de ses activités qui profite à tous (usine de traitement du riz et d’ensachage)à proximité de la capitale.

Mots-clés

gestion d’entreprise, privatisation, rentabilité, riziculture, relations Sud Sud


, Guinée, Plaine de Mochon

Commentaire

Sans doute peu explicitée, la privatisation est très mal comprise dans les campagnes surtout lorsqu’elle est le fait d’étrangers, du Sud qui plus est. Il semblerait nécessaire de montrer par quel biais ces sociétés privées peuvent améliorer les conditions de vie des gens : bons salaires, infrastructures industrielles utilisant des sous-traitants, création de services.

Notes

[Fiche produite dans le cadre du débat public "Acteurs et processus de la coopération", appelé à nourrir la prochaine Convention de Lomé (relations Union Européenne/Pays ACP). Lancé à l’initiative de la Commission Coopération et Développement du Parlement Européen et soutenu par la Commission Européenne, ce débat est animé par la FPH.]

Source

Articles et dossiers

DIALLO, Abdoulaye Diari, SYFIA, L'entreprise privée passe mal au village, PERISCOOP in. Bulletin de presse SYFIA, 1998/12 (France), 120

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