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Une exigence, parfois mal réfléchie, des bailleurs : ’Tout doit venir des populations’ (Moundou, Tchad)

Benoît LECOMTE, Brigitte REY, Fidèle DJETODJIDE KANAYO

04 / 1998

Fidèle Djetodjide Kanayo, responsable de l’ASSAILD (Association d’Appui aux Initiatives Locales de Développement)au Tchad, témoigne :

"Déjà pour la CMD (Caisse Mutuelle de Développement), l’ASSAILD a voulu mettre en place avec d’autres ONG pour faire des crédits plus adéquats, adaptés et de façon durable. C’est une organisation durable mais qui, effectivement, aura le comportement d’une banque tout en travaillant comme une organisation de développement. C’est à dire que si cette coopérative d’épargne et de crédit a des bénéfices, ce ne sera pas pour répartir entre les actionnaires comme dans les banques capitalistes, mais pour redistribuer dans les activités de développement. Si il y a des recettes, ce sera pour faire diminuer le taux d’intérêts par exemple, ou bien pour consolider le capital afin de donner des crédits à moyen et long terme, qui manquent dans nos pays. C’est une banque particulière, mais elle doit faire des recettes comme une banque.

Alors certains nous disent : "cela ne vient pas des populations". Certains de nos partenaires disent : "non, la CMD n’est pas une émanation des populations, donc cela ne peut pas entrer dans nos critères de financement". J’ai fait mon tour en Europe et c’est ce que j’ai entendu. Or, dans la caisse, il y a des participations des populations (par les parts sociales). Les ONG qui sont là-dedans sont mêmes prêtes à céder un jour leurs parts aux populations.

Pour l’ASSAILD, les remboursements des crédits ont constitué des réserves et ont permis à l’ASSAILD de faire partie de la CMD. L’ASSAILD pourra très bien céder ses parts sociales aux groupements, aux populations. Par exemple, World Vision, membre de la CMD et qui a déjà participé par un fonds, est prête à céder un jour ses parts sociales aux populations.

La CMD est donc une organisation pré-coopérative qui peut devenir une coopérative des paysans un jour. Si aujourd’hui, elle n’est pas tout à fait paysanne, elle pourra le devenir. Mais nos partenaires ne comprennent pas qu’on pourra, ensemble ONG et populations, construire quelque chose de solide.

Ils ont en partie raison de dire cela, parce qu’on ne sait jamais où l’argent collecté pour les populations va aller. Les donateurs ont donc naturellement peur que l’argent collecté aille ailleurs. Il faut voir exactement qui va gérer cet argent-là, quelles sont ses conditions d’utilisation, quels sont les contrôles possibles. Et mettre tous les garde-fous qui permettent que ces fonds-là, collectés par les uns et les autres, servent effectivement au développement des populations et non au développement de ceux qui ont collecté l’argent. Pourquoi les bailleurs, qui ont donné de l’argent à l’ASSAILD pour faire du crédit aux individus et aux groupements, maintenant ne veulent pas appuyer une organisation d’épargne et de crédit mixte dans laquelle il y a l’ASSAILD, d’autres organisations et les groupes de base; c’est à dire les populations elles-mêmes ? "

Mots-clés

organisation paysanne, coopérative d’épargne et de crédit


, Tchad, Moundou

dossier

Mettre la coopération européenne au service des acteurs et des processus de développement

Commentaire

Une des difficultés de compréhension entre les organisations du Sud et les "intermédiaires" du système d’aide est la pression des slogans, la succession des modes. "Tout doit venir d’une demande des populations" est l’un de ces slogans; comme si l’opinion de gens souvent peu informés avait seule le droit d’être prise en considération ...

Notes

[Fiche produite dans le cadre du débat public "Acteurs et processus de la coopération", appelé à nourrir la prochaine Convention de Lomé (relations Union Européenne/Pays ACP). Lancé à l’initiative de la Commission Coopération et Développement du Parlement Européen et soutenu par la Commission Européenne, ce débat est animé par la FPH.]

Entretien avec DJETODJIDE KANAYO, Fidèle

Source

Entretien

GRAD (Groupe de Réalisations et d’Animations pour le Développement) - 228 rue du Manet, 74130 Bonneville, FRANCE - Tel 33(0)4 50 97 08 85 - Fax 33(0) 450 25 69 81 - France - www.grad-france.org - grad.fr (@) grad-france.org

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