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Ecologie et démographie

De l’influence réciproque de la remise en état de l’écosystème, de l’alphabétisation de femmes et du profil démographique

Anil AGARWAL

02 / 2001

L’Inde comptait 350 millions d’habitants au moment de l’indépendance. Aujourd’hui le compteur a atteint le chiffre mythique d’un milliard de personnes. Et il y en a 29 de plus chaque minute, 1790 donc toutes les heures. Si les paramètres démographiques restent inchangés, les Indiens seront un milliard 500 millions en 2050. Cette augmentation s’accompagne évidemment d’une multitude de problèmes. Or on sait fort peu de choses sur la charge que peut supporter la terre indienne. Si depuis l’indépendance, en 1947, les leaders du pays avaient agi pour que tous les citoyens sachent lire et écrire, on verrait peut-être apparaître maintenant un début de solution à bon nombre de problèmes, en matière de démographie notamment. A la recherche de solutions harmonieuses entre développement social et stabilité démographique, nos responsables se trouvent confrontés à un problème majeur : l’analphabétisme des femmes. Il est bien connu que des facteurs culturels et économiques entrent en jeu pour empêcher les filles d’aller à l’école. On sait moins que la dégradation de l’environnement pèse aussi lourdement et agit sans doute sur la croissance démographique.

  • Vers 2045 l’Inde sera vraisemblablement plus peuplée que la Chine

  • Quatre pays seulement ont une population supérieure à celle de l’Uttar Pradesh

  • C’est en Inde qu’il y a le plus grand nombre d’adultes analphabètes

  • 53 pour cent des 338 millions d’enfants indiens sont malnutris

Le problème démographique n’est pas seulement un problème social et économique. C’est aussi un problème écologique. Pour les femmes qui font tourner l’économie de subsistance, il est logique de se faire aider par une abondante jeunesse, surtout des filles dont la scolarité sera la première sacrifiée. La dégradation de l’environnement serait-elle à l’origine de nos problèmes démographiques ? Si les femmes passaient moins de temps à chercher du bois de chauffage et du fourrage, leurs journées seraient moins lourdes. Elles auraient alors plus de chance d’apprendre à lire et à écrire, ce qui a une incidence évidente sur le taux de croissance démographique. Les chiffres du recensement de 1981 ont fait apparaître les taux de natalité suivants selon les niveaux d’instruction atteints : aucune instruction : 5,1 ; instruction primaire : 4,5 ; instruction primaire supérieure : 4 ; instruction secondaire : 3,1 instruction supérieure : 2,1. Ceci dit, pauvreté et analphabétisme ne vont pas nécessairement de pair. Au Kérala (sud-est de l’Inde), le taux d’alphabétisation est de 90 pour cent alors qu’il reste à 58 pour cent au Punjab (nord de l’Inde) où le revenu moyen est pourtant deux fois plus élevé qu’au Kérala. Le Viêt-nam, qui est plus pauvre que l’Inde, a réussi à scolariser 94 pour cent de sa population.

Pauvreté écologique et illétrisme des femmes

La pauvreté écologique c’est l’insuffisance, en quantité et en qualité, des ressources naturelles nécessaires au fonctionnement d’une économie basée sur la biomasse. Le temps nécessaire à la collecte de l’eau, du combustible et du fourrage constitue un bon indicateur du niveau de pauvreté écologique. Dans la plupart des sociétés, ce sont là des tâches qui incombent aux femmes. Une enquête réalisée par le Centre pour la Science et l’Environnement dans un village himalayen de 213 habitants fait bien apparaître que la pauvreté écologique a de sérieuses répercussions sur la scolarisation des filles. Au cours de l’année étudiée 366 156 heures sont consacrées aux cultures, aux animaux, aux tâches ménagères, au marché. On estime l’apport des femmes à 58,75 pour cent de ce temps, celui des enfants à 2,32 pour cent, celui des hommes à 14,92 pour cent. La collecte du bois et du fourrage est l’affaire des femmes et des enfants tandis que les petits bergers gardent seuls le bétail au pâturage.

La plupart des enfants commencent tardivement leur scolarité. Vers l’âge de 10 ans ils sont presque tous à l’école mais les filles n’y traînent pas. Parmi les 15-20 ans plus aucune fille dans les classes alors qu’on y trouve encore 78 pour cent des garçons. Moins de 10 pour cent des filles ont dépassé le niveau primaire. A l’âge de 15 ans toutes travaillent aux côtés de leur mère aux tâches agricoles et ménagères, ce qu’elles ont commencé à faire très tôt. Les garçons ne participent jamais aux corvées de fourrage ou de bois, et ils aident aussi à la ferme plus tardivement que les filles. Lorsque les femmes ont une charge de travail très lourde, la scolarité de la fillette sera, au mieux, très brève. Dans les grandes plaines agricoles, pour faire le feu à la cuisine on utilise généralement un tiers de résidus de cultures, un tiers de bouses séchées, un tiers de bois. Dans les zones montagneuses et désertiques, le bois représente plus des deux tiers du combustible. Quand les arbres se font rares, dans les régions arides et même les pentes dégradées des montagnes, un ménage peut passer en tout jusqu’à huit heures par jour à la collecte du bois.

Les démographes ont souvent cité en exemple le Kérala. Le revenu moyen y est médiocre, mais le taux de scolarisation des femmes est élevé et celui de la natalité est faible. Sans doute peut-on voir là l’influence de gouvernements locaux progressistes, depuis longtemps au pouvoir. Mais c’est aussi une région qui jouit d’un climat tropical humide où la biomasse est abondante. Les femmes passent rarement plus d’une heure à faire la corvée de combustible, fourrage et eau. Ce facteur n’a-t-il pas contribué au succès des programmes d’alphabétisation ? Ceux-ci auraient-ils connu le même succès au Rajasthan ou dans d’autres environnements dégradés, là où le travail des femmes est extrêmement pénible ? Les démographes et les environnementalistes ne se sont guère intéressés à cet aspect des choses.

La théorie est simple : lorsque l’environnement se dégrade la charge de travail s’accroît, et les parents chercheront à avoir plus d’enfants pour les raisons suivantes :

  • Il est possible que, dans ces conditions, il y ait moins d’enfants à survivre jusqu’à l’âge adulte.

  • L’élevage se développera au détriment des cultures, et une partie plus importante du travail pourra être confiée aux enfants.

  • Les adultes, surtout les femmes, chercheront sans doute à se faire aider par leurs enfants pour les tâches de collecte dans l’environnement immédiat afin de pouvoir consacrer plus de temps à des travaux plus intensifs ou qui peuvent être d’un certain rapport.

Environnement et démographie

La dégradation de l’environnement fait certainement du tort aux programmes d’alphabétisation des femmes. Elles ont ainsi plus de mal à se prendre en main. Au cours des deux dernières décennies, la dégradation des sols en Inde a entraîné en bien des endroits un appauvrissement des populations et des pénuries d’eau plus fréquentes. Contre ces dégâts, souvent causés par l’homme, certaines collectivités ont réagi pour repartir à la conquête de leur environnement. Deux d’entre elles se sont fait un nom : Suckhomajri, situé au nord-est de Delhi, dans les piémonts de l’Himalaya, et Ralagan Siddhi, sur le plateau du Deccan, dans le Maharashtra. Elles se sont mises au travail dès les années 1970. Dans un premier temps on a récolté l’eau de pluie grâce à de petits barrages en terre. Puis on a mis fin au pâturage libre pour reconstituer la couverture végétale du bassin versant. Le fourrage devenant plus abondant, le cheptel s’est amélioré, l’économie locale est repartie et les départs vers les villes ont fortement chuté. Pour ces deux localités, parallèlement à l’amélioration du niveau de vie et de la scolarisation on a noté une baisse de la natalité. Il serait donc intéressant d’étudier plus avant l’influence réciproque des trois facteurs suivants : remise en état de l’écosystème, alphabétisation des femmes, profil démographique des communautés concernées.

Palavras-chave

demografia, mulher, proteção do meio ambiente, educação, natalidade


, Índia

dossiê

Environnement et pauvreté

Fonte

Texte traduit en français par Gildas Le Bihan et publié dans la revue Notre Terre n°5 - février 2001

Texte d’origine en anglais publié dans la revue Down To Earth : AGARWAL Anil, Beyond the billion. Down To Earth vol. 9 n°3, Center for Science and Environment, 30 juin 2000 (INDE, New Dehli), p. 30-36

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