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L’évolution des services à la personnes (SAP) ou services personnels et domestiques

L’exemple de la France

Emily NORMAND

12 / 2008

Que sont exactement les services à la personne (SAP) ou services personnels et domestiques ? Que regroupent- ils ? Qui rend ces services ? Où et dans quelles conditions travaillent les personnes de ce secteur ? Nous allons tenter d’élucider tous ces questionnements.

Un nouvel intérêt révélé par les politiques sociales et de l’emploi

Les services à la personne existent depuis très longtemps; nous pouvons penser aux « bonnes à tout faire » pendant la période coloniale ou dans les demeures bourgeoises et aristocratiques du siècle dernier. La révolution de ce secteur, c’est le nouvel intérêt que suscitent ces emplois déjà anciens, mais désormais mis en lumière par les politiques sociales et de l’emploi françaises. Le plan dit Borloo de 2005 (du nom de l’actuel ministre) illustre cet engouement : celui de développer le secteur, d’apporter une aide à la personne accessible pour tous et de créer plus de 500 000 emplois en trois ans, en réponse au chômage grandissant. Alors pourquoi tant de frénésie ? Qu’en est-il exactement ?

Auparavant « l’aide aux personnes », si on peut dire, était assurée par le foyer et la famille elle-même, qui garantissait sa propre protection et reproduction sociale. Il y avait une forte solidarité familiale avec un faible recours à une intervention étrangère. Aujourd’hui, on peut dorénavant faire appel à des services à la personne qui sont réalisés par une tierce personne, ne provenant pas du domicile familial. En effet, il y a une réelle demande dans le secteur des SAP pour des personnes dites « fragiles » et/ou dépendantes : les enfants de moins de 6 ans, les personnes de plus de 60 ans et les personnes handicapées. En plus, de ces services directs à la personne, il y a toutes les activités qui concernent de près ou de loin la vie quotidienne comme l’aide ménagère, le nettoyage, la confection des repas, les soins journaliers, l’accompagnement en sortie, l’aide au transport, la promenade des animaux de compagnie, le jardinage etc.…Par contre les services à la personne ne comprennent pas en compte les soins et aides aux malades, activités prises en charge spécifiquement par les auxiliaires de vie et infirmières à domicile.

Des activités très féminines

La nouveauté de ces dernières décennies réside, comme nous l’avons dit plus haut, à un passage en masse de l’auto production, c’est-à-dire réalisé par soi même, à une délégation des tâches à une personne professionnelle. Autrefois, ces activités souvent réalisées par les femmes, mères, épouses au foyer, tendent aujourd’hui, à être externalisées. Toutefois, ce n’est pas pour cela que les femmes ont disparu de la réalisation de ces tâches domestiques, les SAP constituent un secteur à quasi-totalité féminin (95 %). Les hommes sont « seulement » représentés dans les travaux d’entretien d’extérieur comme les jardins.

Il n’y a eu en réalité qu’un transfert du travail domestique des femmes de la famille (aujourd’hui salariées et n’ayant plus autant de temps à accorder à leur foyer) à d’autres femmes professionnalisées dans cette division du travail. Il faut noter, que par ailleurs ce sont beaucoup des femmes d’origine étrangère et immigrées qui travaillent dans les SAP. Ce sont des emplois déqualifiés où sont sur-représentées les femmes immigrées d’Afrique, des Philippines, d’Europe de l’Est et d’Amérique latine. Ces dernières subiraient donc une double domination sexiste et raciste sans parler de l’exploitation.

Ces emplois de SAP présentent l’originalité de pénétrer dans la sphère de l’intime et du privé des individus. Toute la délicatesse demeure en un équilibre, en une confiance et un consensus préalable entre les deux parties, l’employeur et l’employée. L’emploi de « gré à gré » caractérise cette relation.

C’est ce que l’INSEE appelle et catégorise comme « services personnels et domestiques ».

Ce travail domestique doit-il rester privé ou être socialisé ?

Une nécessaire défense des droits du travail de ces emplois

Bien que le lieu de travail soit chez l’employeur, ces femmes ne doivent pas rester dans l’isolement. Il faut structurer le secteur et définir des règles, des lois, des cadres fiscaux et financiers pour protéger et garantir, tant la qualité du service que le paiement et la déclaration en bonne et due forme du salarié. De fait, la particularité de ce type d’emploi est qu’il est directement en lien avec un particulier ; ce qui rend plus difficile la défense des droits du travail de ces emplois. On se retrouve donc dans une situation de morcellement des conventions collectives, regroupant tout un ensemble d’activités diverses et variées. Par exemple, « la Convention collective nationale n° 3180 des salariés du particulier employeur » concerne les activités d’employé de maison, emploi familial, repasseuse, dame de compagnie, garde-malade, cuisinier, femme de chambre, valet de chambre, lingère, secrétaire particulier, maître d’hôtel, chauffeur, nurse, gouvernante, garde d’enfants, etc.

Aujourd’hui, l’augmentation de l’espérance de vie et l’aggravation des pathologies expliquent la création fulgurante d’emploi des SAP ces dernières années. Un français sur trois en 2050 aura plus de 60 ans et le taux de dépendance du pays, c’est-à-dire la part de personnes dont on doit s’occuper en France par l’intermédiaire des SAP, ne cesse d’augmenter.

Un secteur pour créer des emplois, des emplois « altruistes » mais avec des conditions difficiles

Alors que nous sommes en pleine période de crise financière, les SAP représentent un gisement d’emploi, que le gouvernement ne veut pas négliger ou occulter. Deux secteurs ont été porteurs ces dernières années, d’une part les « emplois verts » liés de près ou de loin à l’écologie et au développement durable et d’autre part les SAP dans leur ensemble. En 2006, 103 000 emplois ont été créés dans le secteur des SAP ; en 2007, c’est 130 000 nouveaux emplois et pour le bilan de l’année 2008, on voit la même tendance générale que 2007.

Étant donné que ces emplois répondent à une aide auprès de personnes, celle-ci est généralement « à la demande » et se concrétisent en heures de travail décousues et souvent en temps partiel. Il faut donc une bonne organisation et « jouer à l’équilibriste » pour gérer et combiner plusieurs domiciles. Une des particularités de ce secteur est qu’il se caractérise par la multiplicité des employeurs et non, comme à l’inverse et de façon classique, par un employeur qui dirige une équipe de plusieurs salariés. C’est donc un emploi organisé par le multi salariat, avec lequel il faut s’adapter pour se constituer un salaire proche du temps complet. C’est pourquoi il y a parfois des conditions de travail difficiles; en plus d’une rémunération peu stable, il faut parfois prendre en charge la solitude, la misère, la maladie, ou encore le mauvais caractère des individus. Parce que cet emploi n’est pas un emploi « typique » ; il implique une grande part de relationnel, avec des qualités d’écoute et de patience. « Il faut aimer l’autre, les gens. Il faut aimer rendre service. » C’est ce que les études féministes et économiques anglo-saxonnes ont révélé être des emplois du « care » : un domaine de l’amour et du souci de l’autre.

Une démocratisation de ces services doit être mise en place

Le problème, c’est que tout le monde n’a pas accès à ces services. Un des objectifs du gouvernement et de la loi relative aux SAP est de poursuivre leur démocratisation, en améliorant leur accès au plus grand nombre. 9 personnes sur 10 voudraient des SAP mais ne peuvent y recourir à cause de problèmes de trésorerie : entre le paiement et la date de remboursement pour ces services. Leur but politique est d’apporter une aide d’avance pour que les classes moyennes modestes, avec peu de revenus, puissent tout de même bénéficier des SAP. Ces derniers ne doivent pas être seulement destinés aux familles riches et aisées. Les individus faisant appel à des SAP et payant des impôts, vont pouvoir bénéficier d’une réduction fiscale de 50 %. Il y a alors en ce moment toute une réflexion autour du besoin de créer des crédits d’impôts pour tous les employeurs familiaux.

Les professionnels s’accordent à dire qu’il ne faut pas que la mobilisation et l’utilisation des SAP soient parasitées par des mesures administratives. Il faut pour cela une simplification du système. Nous avons pu observer une évolution entre le « je fais » et « je fais faire » avec un passage progressif d’une gestion du secteur public, au monde associatif puis à l’entreprise. Cette dernière propose aujourd’hui des services simplifiés, plus pratiques et plus sûrs ; qui prend en charge les démarches administratives et légales. Ainsi ce secteur social et professionnel est en pleine expansion depuis ces cinq dernières années et répond à de réels besoins fondamentaux. Les services à la personne, auparavant non marchands, commencent à être proposés de façon massive par les organisations compétentes. En 2007, le taux de croissance économique le plus élevé est celui des SAP, qui était de 12 % et qui ne cesse d’être en hausse constante.

Pour dire cela encore autrement, même le domaine privé des individus commence à devenir public et les frontières entre la famille (lieu de l’amour où la notion d’argent est répugnante et bannie) et le travail (activité rationnelle rémunérée pour aider et assister) tendent à se confondre. Il y a de véritables réformes politiques sociales et solidaires, qui sont en voie de construction, pour aider ceux qui ne bénéficient plus de ce soutien familial. Ces changements justifient donc les évolutions récentes dans le secteur des travaux domestiques et d’aide à domicile. En espérant aussi que les règles sur les conditions de travail soient respectées du côté des employeurs.

Palavras-chave

trabalho das mulheres, direito do trabalho, política social


, Franca

Notas

Emily Normand est étudiante en Master 2 Recherche de Sociologie et Anthropologie, spécialité « migrations et relations interethniques ».

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