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La maîtrise sociale des technologies

Le cas de la télévision haute définition

Pierre Yves GUIHENEUF

06 / 1996

On sait désormais que les systèmes techniques et les systèmes sociaux sont mutuellement influencés. Mais la conscience de leurs nombreuses et complexes interactions suscite parfois un sentiment d’impuissance, tant sont divers et puissants les enjeux, multiples les acteurs, indéterminé le résultat de leur combinatoire. Il faut cependant dépasser ce sentiment de découragement pour poser la question de la maîtrise sociale des technologies et repérer les processus par lesquels les acteurs collectifs peuvent intervenir sur ces interactions pour en minimiser les effets négatifs. Deux cas sont examinés dans ce dossier : celui de la télévision haute définition (dite TVHD)qui fait l’objet de cette fiche et celui de l’automobile, repris dans le livre de J.P. Orfeuil "Je suis l’automobile" qui fait l’objet d’une autre fiche.

Le procédé de télévision dit "à haute définition" vise à améliorer le confort visuel du téléspectateur, ce qui passe par l’adoption de postes adaptés pour cela, dits 16/9. Son intérêt réside également dans la possibilité d’utiliser les mêmes films au cinéma et à la télévision (donc les mêmes caméras, les mêmes studios, les mêmes supports de diffusion)et de poursuivre ainsi les rapprochements entre l’industrie cinématographique et celle de l’audiovisuel et des réseaux mondiaux de télévision. Le contexte de cette innovation est d’abord celui de la mondialisation, de la circulation toujours plus grande des chaînes et de la concurrence entre les principaux pays industrialisés du monde pour entrer en force sur ce marché. L’enjeu est donc double : il est d’abord industriel, car il touche tout le marché de l’électronique de demain, et culturel, car il concerne la diffusion des images et des messages à travers toute la planète.

L’enjeu économique est considérable et repose sur un pari risqué : il suppose qu’à terme, les téléspectateurs acceptent de changer leur téléviseur ainsi que les périphériques : magnétoscopes, caméscopes... Trois régions du monde s’affrontent par firmes interposées pour développer des recherches et imposer leurs standards : les Etats-Unis, l’Union européenne, le Japon. Pour comprendre les stratégies en présence, il faut savoir que le marché des téléviseurs est quasiment saturé, les achats sont simplement des renouvellements. Le 16/9 pourrait donc donner un coup de fouet décisif au secteur. En outre, la technologie est de plus en plus facilement maîtrisée par des pays asiatiques qui produisent en masse et font baisser les prix. La télévision HD permettrait donc aux "poids lourds" de l’industrie électronique de prendre une longueur d’avance sur leurs concurrents et de faire se redresser les profits.

Mais la TVHD concerne également les diffuseurs de programmes, qui devraient adapter leurs produits au nouveau standard. C’est là que l’affaire se corse : les stratégies ne sont pas les mêmes. Le marché des programmes est en effet en croissance rapide et loin d’être saturé. La logique des diffuseurs est de multiplier les chaînes plutôt que de renouveler le matériel. Alors que les constructeurs cherchent à se différencier par la qualité des images, les diffuseurs se battent sur une offre variée de programmes. Rien à voir...

Face à ces stratégies industrielles et commerciales, le citoyen vote avec sa télécommande, ou plutôt avec la possibilité qui lui est laissée de ne pas acheter de téléviseur dernier cri ou de ne pas souscrire d’abonnement pour les chaînes payantes. Il est une cible pour les commerciaux et non pas un partenaire.

L’action publique, quant à elle, est placée devant un choix difficile, celui d’appuyer les industriels de l’électronique ou celui de développer les services et les programmes. Alors que les premiers ont besoin d’un marché mondial organisé, structuré, fonctionnant sur des bases réglementaires solides pour engager des paris de long terme et ne pas s’épuiser dans une guerre des standards, les seconds ont au contraire besoin d’un maximum de liberté, donc d’un marché déréglementé.

Le choix est sans doute celui-là : faut-il ou non réglementer le marché mondial de la télévision ? Pour l’Europe, la voie de la sagesse pourrait être d’adopter une voie médiane : s’imposer comme un partenaire incontournable face aux Américains et aux Asiatiques, en affirmant son identité et sa présence dans quelques domaines stratégiques. L’Europe doit veiller à préserver ses spécificités culturelles tout autant que son industrie électronique. Les enjeux de la télévision montrent que, dans ce qui paraît être une bataille de firmes, le rôle des Etats est primordial.

Palavras-chave

ciência e cultura, tecnologia da informação e da comunicação, televisão, comunicação, inovação técnica


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Fonte

Actas de colóquio, seminário, encontro,…

CORIAT, Benjamin, La maîtrise sociale des technologies, FPH in. Document de travail, 1993/09 (France), n° 40

GEYSER (Groupe d’Etudes et de Services pour l’Economie des Ressources) - Rue Grande, 04870 Saint Michel l’Observatoire, FRANCE - Franca - www.geyser.asso.fr - geyser (@) geyser.asso.fr

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