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La menace néolibérale sur le logement social

Joachim OELLERICH

09 / 2008

Après la seconde guerre mondiale et dans la plupart des pays européens, le logement social s’est développé dans le cadre de l’Etat providence comme un élément essentiel du système économique fordiste.

La production et la consommation de masse ainsi qu’une politique financière anticyclique orientée vers la demande ont pris une importance majeure. Le logement social, dans sa forme et dans la fonction qu’il remplit, correspond à ce contexte typiquement fordiste marqué par le développement de familles de petite taille vivant avec une situation de travail normalisée et sécurisée.

Vers la fin des années 1970, ce modèle est entré en crise. L’agression néolibérale contre l’Etat social s’est tournée vers le logement social. En Angleterre, l’une des premières mesures du gouvernement de Margaret Thatcher après sa victoire électorale en 1979 a concerné les logements publics du Council Housing, qui ont pu être vendus massivement aux locataires occupants (c’est ce qu’on appelle le Right to buy). C’est ainsi qu’en 1980, le nombre de logements sociaux vendus a dépassé celui des logements construits et que le stock de logements sociaux a diminué jusqu’en 1989 passant de 6 à 4,8 millions.

En 1985, les instances communales ont été habilitées à se transformer en sociétés immobilières et, avec l’autorisation des locataires, à transmettre leur patrimoine à d’autres propriétaires, des coopératives par exemple (social landlords en anglais).

Aux Pays-Bas, pays où le taux de logements locatifs et sociaux est le plus élevé d’Europe, les fondements du recul très net de l’Etat dans son rôle d’approvisionnement en matière de logement ont été posés avec l’adoption en 1988 d’un mémorandum portant le nom du ministre de la construction de l’époque Heerma. La construction de logements subventionnée par l’Etat a été drastiquement restreinte et le patrimoine communal transféré jusqu’en 1997 à des associations à vocation immobilière intervenant comme des bailleurs privés avec une mission d’utilité publique.

En Allemagne, le soutien au logement social a historiquement pris la forme de subventions à la construction qui étaient compensées, durant la période de remboursement des prêts publics, par une attribution sociale temporaire (ce qui signifie que les appartements, une fois l’emprunt public remboursé, perdent leur caractère social et retournent dans le parc privé). Depuis les années 1980, la réduction continue du soutien public à la construction a débouché sur la fonte significative et ininterrompue du patrimoine de logements à vocation sociale. En 2001, les bases légales de cette aide à la construction ont été finalement modifiées, de telle manière que le caractère social des quelques logements encore soutenus a presque complètement disparu. Parallèlement à cela, des municipalités ont vendu leurs sociétés de logement public à des investisseurs financiers internationaux.

Si les transformations évoquées plus haut dans les pays de l’Europe de l’Ouest ont été déterminantes, elles ont été largement supplantées par les libéralisations qui ont été réalisées dans les anciens pays socialistes à partir des années 1990. La Pologne, pour ne citer qu’un exemple, possède désormais le taux de logements sociaux le plus faible d’Europe, avec 0,3 % du total de ses logements.

Un mouvement qui irait à l’encontre de la libéralisation du marché du logement à l’échelle européenne n’est pas encore à l’Ĺ“uvre actuellement. Pourtant, dans beaucoup de pays européens, les discussions qui s’ouvrent sur les solutions d’auto-organisation en matière de logement, comme les coopératives, mettent en évidence le besoin de revitalisation de la dimension sociale du logement.

Key words

social housing, habitat policy, privatization


, Europe

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Europe : pas sans toit ! Le logement en question

Notes

Joachim Oellerich travaille pour la BMG (Berliner Mieter Gemeinschaft), une association de locataires à Berlin. Il est rédacteur en chef de sa revue, le MieterEcho. Contact : me (at) bmgev.de

Traduction de l’allemand : Lucie Lechevalier Hurard, avec l’aide d’Elodie Vittu

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