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Madagascar : les évolutions relatives

Elisabeth HOFMANN

12 / 2008

A Madagascar, comme ailleurs, les inégalités dont pâtissent les femmes sont avant tout socialement construites, sur la base de la culture. Faire évoluer les choses demande d’être patient et de composer avec la tradition.

Le genre et un concept qui fait référence aux aspects culturels et sociaux qui conditionnent les rôles des femmes et des hommes dans tous les domaines, économique, social, politique… Seule une petite partie des différences entre les femmes et les hommes peut être justifiée par des différences biologiques. Les inégalités, dont pâtissent les femmes un peu partout dans le monde, sont avant tout socialement construites, sur la base de la culture, dans son acceptation la plus large.

Madagascar, femmes actives

La région de l’Androy, au Sud de Madagascar, est très aride. Elle est peuplée d’éleveurs qui vivent dans le respect de nombreuses croyances. Cette société se caractérise par une organisation sociale très stratifiée, où la distinction entre les rôles des hommes et des femmes est très forte. Il en va ainsi de l’approvisionnement en eau. Les femmes doivent se lever aux aurores et parcourir plusieurs kilomètres à pieds pour puiser l’eau, ce qui leur prend généralement toute la matinée. Si les points d’eau situés à une distance faisable à pied sont à secs, certains hommes du village prennent alors le relais. Ils vont chercher de l’eau, dans des fûts, à l’aide d’une charrette tirée par des zébus.

Le GRET (1) a mené dans cette région un projet sur la sécurité alimentaire, à travers lequel il a cherché à impliquer les femmes activement dans la gestion des infrastructures d’eau, et ce malgré les coutumes qui attribuent la gestion de la chose publique exclusivement aux hommes. Les résultats ont été considérables puisque, au final, les comités de gestion comportaient un nombre significatif de femmes. Lors des réunions d’évaluation du projet, certaines étaient très fières de ce nouveau rôle public et le prenaient très au sérieux. D’autres étaient sceptiques : « Nous avons déjà beaucoup à faire, nous sommes fatiguées, les hommes ont le temps de s’occuper de ça et en plus, c’est leur rôle ».

Les « consignes du projet » ont souvent été évoquées pour justifier la nomination de femmes à de telles postes, quand ce n’était pas des raisons utilitaristes (« l’eau est l’affaire des femmes, elles restent dans les villages et peuvent surveiller l’infrastructure comme leur propre case »), valorisant ainsi les tâches traditionnelles, sans remettre en question leur répartition et souvent sans les impliquer davantage dans l’ensemble des décisions publiques. Dans les villages où peu ou pas de femmes participent aux comités, la tradition est évoquée. On va jusqu’à clamer que c’est pour les protéger que les notables du village ne les ont pas choisies comme membres des comités.

Appréciations variables

Les résultats mitigés ont suscité évidemment des réactions variables de la part des observateurs externes. Certains ont considéré que, compte tenu du contexte au Sud de Madagascar, les résultats obtenus étaient tout à fait significatifs et ont exprimé l’espoir que l’implication des femmes allait augmenter la viabilité des comités de gestion de l’eau. D’autres, en revanche, ont insisté sur le fait que cette démarche volontariste n’était pas pertinente car la structure sociale de la société n’évoluait pas « naturellement » dans ce sens (et qu’il n’y avait pas une demande de la part de certaines femmes). D’autres encore ont souligné que le travail de sensibilisation, intense et effective, mené par le GRET, était trop court (environ un an) pour pouvoir porter des fruits viables.

Céline Ralalarisoa, la seule femme maire de la région, a sa propre opinion. Elle considère que la participation des femmes dans la sphère publique avance, lentement et en composant constamment avec la tradition. Les femmes assistent de plus en plus, aux réunions villageoises, mais en deuxième rang et sans parler, leur parole n’étant de toute façon pas ou peu prise en compte. Quand cette fonctionnaire à la retraite a voulu se présenter au poste de maire, elle a d’abord demandé aux notables. Ils ont fini par lui donner leur accord en lui disant que, comme elle était ménopausée, elle était désormais considérée comme un être asexué dont la candidature à la mairie pouvait recevoir leur soutien. Ce qui n’empêche qu’elle doit faire ses preuves, au moins autant sinon plus que si elle était un homme…

1 Groupe de recherches et d’échanges technologiques (GRET) – www.gret.org

Key words

traditional cultivation, gender, political access for women, role of women


, Madagascar

file

L’impossible dialogue des cultures ?

Notes

Elisabeth Hofmann, Réseau genre en action

Source

Altermondes n°16 - décembre 2008 > février 2009, www.altermondes.org

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