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Et si on relocalisait la science ?

Le sud a t-il son mot à dire ?

Céline BOILEAU

05 / 2011

Parce que la recherche doit aussi se concevoir à partir des réalités locales, les collectivités territoriales contribuent désormais à renforcer les liens entre le monde de la recherche et la société civile. Entretien avec Sandrine Rousseau, vice présidente de la Région Nord-Pas de Calais en charge de l’enseignement et de la recherche.

Comment est née l’idée de soutenir la rencontre entre la communauté scientifique et la société civile dans la région?

Sandrine Rousseau: Les associations de la société civile sont demandeuses de recherches sur les sujets pour lesquels elles se mobilisent. Elles trouvent par contre assez rarement des chercheurs qui répondent à ses demandes. Et lorsque c’est le cas soit elles manquent de budget soit le caractère scientifique de leur projet est insuffisant. De leur côté, les chercheurs sont généralement contraints par un système institutionnel où ils n’existent qu’au travers de leurs publications scientifiques. Certains ont des thèmes de recherche qui n’entrent pas dans une ligne institutionnelle et rencontrent également des problèmes pour valider le caractère scientifique de leurs travaux. C’est pour moi la preuve que chacun trouve un intérêt à cette rencontre.

Quel dispositif allez-vous mettre en place et quels en sont les moyens?

S.R.: En s’inspirant du Picri (Partenariat institutions citoyens pour la recherche et l’innovation, créé par la Région Ile-de-France), le Conseil régional Nord-Pas de Calais lance un appel à projets «Chercheurs Citoyens», auquel est allouée une enveloppe de 300 000 €pour 2011, année d’expérimentation de ce nouveau programme. Chaque projet bénéficie d’une aide de 50 000 € maximum par an, renouvelable deux fois. Pour prétendre à cette subvention, les projets doivent reposer sur une collaboration entre un laboratoire de recherche et une organisation de la société civile à but non lucratif. Certaines idées ont déjà émergé autour de la vulgarisation scientifique, de l’économie sociale et solidaire, de la protection de l’environnement ou de la sécurité des produits de consommation. Cette initiative vient en appui d’une demande de la société et se conçoit comme complémentaire de la recherche fondamentale. Elle s’inscrit dans un dispositif d’ensemble. Par ailleurs, nous allons organiser des assises de l’enseignement supérieur et de la recherche, ouvertes au public. Les liens entre sciences et société, de même que les enjeux liés à la démocratisation de l’enseignement supérieur y seront débattus de manière approfondie.

Quel est l’intérêt pour les habitants de la région?

S.R.: L’impact local est très concret. Par exemple, une association travaille sur les conséquences d’un incinérateur qui a pollué les sols à la dioxine. L’incinérateur a été fermé il y a plus de quatre ans mais on ne sait toujours pas s’il est possible de replanter des légumes après une contamination à la dioxine, ni combien de temps il faut attendre avant de consommer cette production sans danger. Dans ce cas très précis, la recherche conjointe entre l’association locale et des laboratoires apportera des éléments de réponse adaptés à la situation vécue par les habitants. De manière plus générale, je partage l’idée d’une relocalisation d’une partie de la science. Il y a actuellement une sorte de dérive en faveur de l’internationalisation, ce qui conduit trop souvent la recherche à oublier ou à mettre de côté les solutions locales. Or les chercheurs doivent éclairer la société sur tous les chemins possibles, ils ont aussi une responsabilité sociale. Il faut certes soutenir l’innovation dans les entreprises, mais pas seulement. Pour l’heure, on sacralise le progrès technique dans les débats, par exemple sur le climat ou les nanotechnologies, les OGM ou le nucléaire. Mais on peut financer une recherche qui va dans un autre sens, plus local.

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