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dialogues, proposals, stories for global citizenship

Communication interculturelle

Récit d’un contact difficile entre une équipe d’intervention et la population d’un village sinistré

Tom ROBERTS

05 / 1993

En Octobre 1979, l’ouragan David s’abat sur les Antilles et traverse l’île de la République Dominicaine, semant la mort et la destruction sur son passage.

Quelques jours après, une équipe de l’Action d’Urgence Internationale arrive dans l’île. Les premiers contacts sont pris avec une organisation locale, la CEPAE. C’est à partir des informations de celle-ci que l’éqipe de l’AUI décide d’intervenir à Sabana Largua, dans la région de San José de Occoa.

D’après les informations disponibles, le seul moyen d’accès était l’hélicoptère, car les ponts entre la capitale et la région concernée avaient été détruits. Il était donc nécessaire de passer par l’armée américaine qui détenait le "monopole des airs".

Les responsables militaires ainsi que les pilotes tentaient de décourager l’entreprise en mettant l’équipe en garde par rapport aux réactions imprévisibles, sinon violentes, des populations démunies voyant arriver du matériel et des vivres.

L’équipe était déjà habituée à de telles mises en garde... Des récits de réactions de masse -souvent épouvantables- où des survivants, affamés, se seraient battus à mort pour quelques rats, ont souvent été contés et la réalité rencontrée démentait toujours la rumeur.

C’est ainsi que l’équipe se posa à Sabana Largua. L’arrivée ne fut pas vraiment discrète, car aussitôt, une foule de cent à deux cents personnes arriva et encercla le groupe. Dés que la dernière cantine fut posée à terre, le pilote décolla et l’hélicoptère disparut.

Alors regna le silence ; un silence glacial. L’équipe observa la foule et la foule observa l’équipe. Personne ne dit un mot, personne ne fit un geste. Naquit alors un malaise.

Puis l’immobilité fut brisée par un geste... celui d’un homme qui leva la main, tendit l’index et fit un mouvement brusque en travers de sa gorge...

Ce geste fit sursauter, et pour cause : la signification habituelle étant "on tranche la gorge..."

L’incertitude du moment s’amplifia, car ce geste menaçant fut vite repris par d’autres personnes dans la foule. Les volontaires sentirent monter au fond d’eux quelque chose qui pouvait s’apparenter à l’angoisse. Les pilotes américains avaient-ils raison? L’équipe s’était-elle jetée dans la "gueule du loup?"

Et puis, d’un seul coup, quelques responsables du village entrèrent en scène et la parole brisa le silence. Les raisons de notre présence furent exposées et, en quelques minutes, ceux-là même qui menaçaient saisirent le matériel et amenèrent les volontaires dans le village afin de les installer confortablement dans une grange.

Pendant le trajet, un membre de l’équipe demanda à un des responsables le sens de cet accueil étrange. L’interlocuteur sembla étonné et ce n’est qu’en mimant le geste en question qu’il sourit et répondit : "Chez nous, ce geste veut dire "tenemos nada"."

En français : "Nous n’avons rien."...

Key words

natural disaster, communication, cultural development, cultural interdependence, cross cultural dialogue


, Dominican Republic

Comments

Cette petite histoire est une histoire d’incompréhension. Une sorte de "décalage" de fréquences lors d’une tentative de communication. La scène met en jeu deux groupe d’acteurs qui ont des références différentes... De toute évidence, chaque partie cherche à établir un contact, mais le courant ne passe pas. Il est facile d’imaginer les conséquences désastreuses qui auraient pu en découler s’il s’agissait de l’arrivée de militaires lors d’une situation de conflit. Heureusement, l’épisode déboucha sur le développement de relations exceptionnelles entre un village et une équipe d’intervention.

Source

Grey literature

ROBERTS, Tom

AUI (Action d’Urgence Internationale) - Terrasses Montcalm, 1401 rue Fontcouverte, 34070 Montpelllier, FRANCE - Tél 33 (0) 4 67 27 06 09 - fax 33 (0)4 67 27 03 59 - France - www.aui-ong.org - info (@) aui-ong.org

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