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Le processus de subjectivation de l’acteur

12 / 1995

Des trois logiques proposées par Dubet dans sa théorie de l’expérience sociale, les deux premières, l’intégration et la stratégie, apparaissent comme des réalités "positives". La "subjectivation" ou "logique du sujet" (troisième logique), n’apparaît que d’une manière indirecte dans "l’activité critique" rendue possible par une culture qui fait du conflit un concept central (les tensions dialectiques sont instaurées principalement entre altérité et domination). La culture n’est donc pas seulement l’ensemble des valeurs et des normes qui soudent une société, elle est aussi une définition historique du sujet autorisant la critique sociale et par là, nous conduisant à l’autonomie (ou subjectivation)de l’acteur.

Naturellement, Dubet fonde sur cette logique, un acteur qui n’est réductible ni à ses rôles ni à ses intérêts lorsqu’il adopte un autre point de vue que celui de l’intégration ou de la stratégie.

Ce processus est défini par le "travail et non par l’être" d’un sujet conscient grâce à la connaissance des lois de la société. Par ce travail, caractérisé surtout par ce jeu de tensions, le sujet se perçoit comme l’auteur de sa propre vie, ne serait-ce que "dans la souffrance créée par l’impossibilité de réaliser pleinement son projet".

Du point de vue de l’auto-perception de l’expérience sociale, le sujet se constitue dans la mesure où il est tenu de construire une action autonome et une identité propre en raison même de la pluralité des mécanismes ou de l’hétérogénéité des logiques de l’action qui se croisent dans l’expérience sociale. C’est dans la domination que l’individu devient sujet autonome (sujet-acteur).

S’instaure ainsi une distance subjective que les individus entretiennent avec l’ordre social (le système): les acteurs paraissent n’être jamais pleinement dans leur action, dans leur culture, dans leurs intérêts; ils paraissent garder une distance critique, racontent comment ils construisent leurs pratiques dans un monde "déjà là". Cela fait de chacun l’auteur de son expérience, mais c’est une construction relative, car les éléments sur lesquels elle repose, n’appartient pas aux individus mais à la société.

Pour Dubet, dans la continuité de la pensée sociologique de Touraine, la modernité constitue un tournant historique; époque surtout dominée par la disjonction des ordres politique, économique et culturel, par l’éclatement des rôles et par la séparation du rôle social et de la personne (ce qui signe la mort des peronnages). Ainsi, il est désormais impossible que l’identité des individus repose sur quelque principe central que ce soit.

Par son travail culturel et critique de subjectivation, le sujet-acteur s’oppose à l’individu qui n’a pas intériorisé les valeurs essentielles de la société, celles qui peuvent le rendre autonome, à l’individu qui souffre donc non plus de l’excès d’intériorisation normative, mais d’une crise d’indentité car il ne sait plus qui il est lui-même en dehors des gratifications immédiates de la consommation.

L’homme contemporain, note enfin Dubet, sans valeurs pour orienter son action, devient réceptacle facile des stimulations publicitaires, porté par un penchant conformiste, manipulé par les médias et par un désir de reconnaissance immédiate et futile. Il en résulte que le sujet contemporain, ou bien se replie sur ses passions et intérêts privés, ne s’éprouvant que dans la distance à la société, ou bien, devient entièrement "l’homo oeconomicus", acteur rationnel guidé par ses seuls intérêts.

Key words

cultural development, social actor, social insertion, scientific theory


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Source

Book

DUBET, François, Sociologie de l'expérience, SEUIL, 1994/10/00 (France)

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