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PORTUGAL : l’agriculture biologique à la croisée des problématiques Nord-Sud

Frédéric PRAT

05 / 1993

L’exemple portugais reflète la convergence de deux problématiques caractéristiques l’une du Sud, l’autre du Nord : en effet, en l’absence d’investissements importants dans le secteur agricole au cours des années 50 (tels que l’ont connus les autres pays européens), l’agriculture portugaise est restée très tradionnelle (22% de la population active, nombreuses petites exploitations). Le Portugal, à l’instar des pays du Sud, est contraint à l’heure actuelle d’importer une partie de ses produits vivriers (viandes, légumes, céréales). Et, comme les pays du Sud, il a d’abord cherché des débouchés pour ses produits biologiques sur les marchés d’exportation. Mais la comparaison s’arrête là : la main d’oeuvre bon marché et les produits tropicaux sont au sud de la Méditerranée. Le développement de la production nationale dépend donc du marché local composé de consommateurs de plus en plus sensibilisés. Les trois exemples suivants reflètent des stratégies différentes, mais tournées vers un même objectif : le développement de l’agriculture biologique portugaise.

Marie-José: des débouchés nationaux pour des produits de qualité.

Il y a deux ans, Marie-José s’est installée sur 2 ha de forêts de pins à une vingtaine de kilomètres de Lisbonne. Après avoir défriché 1,5 hectare, elle a entrepris de mettre en valeur le sol sableux en y apportant du compost : chaque semaine, elle remplit une fourgonette de déchets d’une petite entreprise qui fabrique de l’agar-agar (extrait d’algues marines); le tout est complété avec du basalte, un peu de fumier et des déchets ligneux. Après avoir réalisé un forage de 130 m de profondeur (puits artésien), elle avait les moyens d’entreprendre la culture de plantes condimentaires (fenouil, basilic,...), salades variées (feuilles de chêne, batavia rouge,...), mini-légumes et fleurs comestibles (pensées, bourraches,...)destinés à de bons restaurants de Lisbonne. Production de plein champ et sous serre.

Actuellement, Marie-José a une clientèle sûre à qui elle livre 3 matinées par semaine. L’extension de son entreprise lui a permis d’embaucher 2 personnes spécialisées en désherbage manuel !

Avec quelques amis adhérents à Agrobio Portugal, elle vient de constituer une petite société pour permettre la commercialisation de fruits et légumes biologiques en supermarchés (préemballage).

Les bénéfices de cette société seront investis en actions de promotion et moyens de développement agricoles.

Jean-Pierre : marchés tous azimut.

Jean-Pierre vient de Suisse ; il s’est installé, il y a 5 ans, sur un petit domaine de 9 hectares situé à une dizaine de kilomètres de Lagos (Algarve).

Son projet initial était de mettre en place un verger de jujubiers, mais pour faire face à des besoins à plus court terme, il s’est lancé dans la production de légumes de plein champ et sous abri : petits pois, haricots, concombres tomates.Pour mener à bien son projet, il a dû creuser un forage de 90 mètres, se procurer du matériel d’occasion en Suisse (tracteur et bineuse)et se lancer dans la production et la vente.

Jean-Pierre souligne les difficultés d’approvisionnement : engrais organiques et fumiers se vendent à prix d’or, il faut parfois une semaine pour se procurer des cageots, les semences légumières sont de mauvaise qualité, les pièces détachées pour l’entretien du matériel introuvables ; quant aux produits de traitement autorisés par le cahier des charges, ils sont, pour la plupart, interdits d’importation.

Pour vendre des produits biologiques au Portugal, il faut porter la marchandise à Lisbonne pour un prix sensiblement égal à celui des cultures traditionnelles ; l’autre solution consistait à exporter sur la Suisse (envoi de petits pois et haricots par avion)ou sur la France ; mais l’éloignement rend les transactions difficiles (coupures de téléphone, informations sur les prix du marché, mauvais payeurs, agréage de la marchandise).

Le groupage de marchandises avec un voisin en bio permettra peut-être à l’avenir d’organiser des transports routiers via l’Espagne pour Perpignan..

Senda : micro-trust portuguais de l’expédition de produits bios

Senda est une société d’expédition de fruits et légumes biologiques située à Colarès (40km de Lisbonne).

Créée il y a tout juste quatre ans, elle a connu un essor extrêmement rapide qui s’explique par le dynamisme commercial et l’ambition de ses gérants mais également et surtout par la demande de pays du nord (Angleterre, France, Belgique)pour des produits de contre-saison.

Les producteurs de Senda au nombre de 40, sont pour l’essentiel de gros propriétaires fonciers.

Les principaux produits commercialisés sont : pommes de terre primeur, aubergine, melons, poivrons, oignons jaunes, oranges, citrons, clémentines.

La société assume la collecte des produits ainsi que le tri et le conditionnement. La planification est suivie de très près par une équipe de quatre techniciens.

Les prévisions pour 1993 sont de l’ordre de 7000 tonnes dont 50% en oranges et pommes de terre.

Depuis cette année, Senda s’intéresse également au marché intérieur ; elle a créé une marque pour la vente en supermarchés de fruits et légumes préemballés.

L’agrobiologie au Portugal

Les trois projets précédents n’auraient sans doute pas pu voir le jour sans la ténacité d’un petit groupe de personnes motivées qui ont fondé, il y a une dizaine d’années, Agrobio Portugal. Cette association regroupe actuellement 1600 membres dont une centaine de producteurs répartis sur les régions de Lisbonne, Porto, Coïmbra et Faro. Les producteurs d’Agrobio font référence à un cahier des charges et des systèmes de contrôle et de certification communs.

Les principales productions sont l’olive, les fruits, les légumes, mais il y a relativement peu de céréales, produits laitiers et viande. Parmi les producteurs, on dénombre beaucoup de néoruraux et d’étrangers. 4 conseillers agricoles viennent d’être embauchés avec l’aide de crédits publics pour développer l’agriculture biologique.

Key words

organic farming, commercialization, agricultural exports, access to market, urban farming, access to water, horticulture


, Portugal

Notes

Tiré de "Portugal : tournée bio" de FCAAA. Alter Agri n°4 (ENCART AQUITAINE). Calç. de Tapada, 39 r/c dt°, 1300 Lisboa, PORTUGAL.

Source

Articles and files

ITAB in. ALTER AGRI, 1993 (France), N°4

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