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Une ONG pour l’agriculture biologique en Géorgie : Elkana 1

Elkana conseille les agriculteurs et soutient des projets de villages en utilisant une méthode d’accompagnement participative

Ina RANSON

01 / 2000

L’association Elkana a été créée à Tbilisi en 1993, par un groupe de neuf agriculteurs avec l’objectif d’améliorer les conditions de vie des petits paysans. L’écroulement du système soviétique avait entraîné la désorganisation totale de l’agriculture géorgienne et le retour à une "agriculture de survie".

Quelques agriculteurs engagés dans le parti des Verts désiraient alors promouvoir l’agriculture biologique et aider les villages à reconstruire leur communauté. Ils ont été soutenus par un spécialiste allemand, Berthold Schrimpf, engagé, à l’époque, dans une organisation d’aide humanitaire, et qui depuis n’a cessé d’aider ses amis.

En 1993, les paysans pionniers commencèrent à expérimenter l’agriculture biologique dans une ferme modèle, cherchant à retrouver un savoir-faire ancien tout en l’adaptant aux connaissances nouvelles. Ils savaient que contrairement aux idées reçues de beaucoup, l’agriculture biologique signifie bien plus que de renoncer à des produits chimiques ; c’est un art complexe et exigeant.

Aujourd’hui, en décembre 1999, plus de cent fermes se sont associées à Elkana. Elles se trouvent dans toutes les parties de la Géorgie. Il y a des fermes isolées, mais aussi des villages entiers, cinq diocèses et trois monastères (comprenant environ 1 000 habitants). Depuis 1996, Elkana est membre du réseau international IFOAM.

Comment travaille Elkana ?

Le groupe qui pilote l’association s’est construit au cours de nombreuses années de coopération. Les personnes embauchées par Elkana ont toujours répondu à une annonce et se sont qualifiées au cours d’une longue période d’essai - procédé inhabituel en Géorgie. On a pris soin de réunir des personnes d’origine diverse et dont les compétences se complètent - compétences techniques, mais aussi capacité d’adaptation aux cultures locales, ouverture d’esprit, patience...

La ligne de force d’Elkana est d’appuyer en premier lieu les propres capacités des paysans pour qu’ils prennent des initiatives et trouvent eux-mêmes des solutions à leurs problèmes. En effet, dans tous les pays de l’ancien bloc soviétique, les gens ont été trop habitués à attendre que tous les changements viennent d’en haut.

Avant la période soviétique, les villages géorgiens avaient été des communautés unies par une riche tradition s’exprimant par de nombreuses coutumes et une pratique constante d’entr’aide. Les paysans savaient comment résoudre ensemble les problèmes auxquels ils étaient confrontés. Mais transformés en ouvriers agricoles, pendant 70 ans, ils ont le plus souvent perdu l’envie de prendre des initiatives et de se sentir responsables de la communauté. Et les guerres récentes (notamment la guerre civile sous Gamsachurdia)ont souvent accentué des clivages entre des familles ou des clans. Pourtant les problèmes actuels nécessiteraient que tout le monde s’unisse pour y faire face. Elkana tente de relever ce défi en invitant tous les habitants d’un village à l’élaboration de projets.

La méthode participative de PLA (Participation in Learning and Acting).

Au cours de plusieurs années d’expérimentation, Elkana a adapté au contexte local une méthode souvent utilisée par des ONG anglo-saxonnes : PLA. C’est une méthode qui accompagne les acteurs ; l’aide est proposée seulement en réponse à une demande précise et en appui aux efforts des personnes qui s’engagent pour la réalisation de projets.

PLA prévoit trois ou quatre phases de coopération. Quand, par exemple, un village s’adresse à Elkana pour y trouver un soutien, la première démarche de l’association est de recueillir des informations multiples, en s’adressant à des personnes ayant une connaissance spécifique du terrain : certains paysans et paysannes, mais aussi des géographes, historiens, ethnologues, sociologues etc. Après cette première étape de sondage, l’association fait préciser ces informations par d’autres sources locales pour établir une première représentation du village.

Ensuite seulement commence la troisième phase qui est la plus importante : une démarche de réflexion collective avec les gens du village. Ceux-ci organisent une grande assemblée au cours de laquelle seront débattus de nombreux problèmes. Elle se terminera par l’élection d’un comité du village. Il est très important que beaucoup de personnes participent à ce débat et que les gens du village précisent eux-mêmes quels sont les problèmes majeurs qu’il faudra résoudre en premier lieu. Le débat aborde aussi les ressources dont dispose le village : richesses naturelles, culturelles (traditions), compétences, force de travail disponible, moyens financiers... Les animateurs d’Elkana aident à écrire toutes les contributions sur de grandes affiches.

La quatrième phase du processus se déroule en partie sans l’accompagnement d’Elkana : la décision de réaliser un projet conçu par les gens du village et qui répond à un problème prioritaire. Elkana s’est engagée à les soutenir dès qu’ils auront avancé dans la réalisation du projet et quand ils auront utilisé la moitié de l’argent qui y est nécessaire. Le village devra trouver lui-même cet argent. L’autre moitié de la somme nécessaire pour la réalisation du projet leur sera accordée par l’association.

Cette méthode d’accompagnement a été expérimentée, à petite échelle, au cours de quatre années où il y a eu des échecs et des réussites. Elle a été modifiée en fonction des expériences avant d’être utilisée à plus grande échelle, par exemple dans la région de Gombori. Elkana a ainsi contribué à financer la construction de routes ou de ponts, mais toujours dans le cadre de projets plus vastes liés à l’agriculture biologique.

Comment entretenir les contacts et assurer un travail de formation continue ?

Elkana attache beaucoup d’importance à un contact régulier avec les paysans membres:

  • un "service de prolongement" ("extension service"), composé de cinq personnes qui voyagent de ferme en ferme, est à la disposition des paysans. Ce service fournit aussi de la documentation utile, par exemple des brochures sur des thèmes spécifiques (biogaz, fertilité des sols, compostage...)et distribue un bulletin ("l’agriculteur biologique")qui paraît régulièrement. De temps en temps, les agriculteurs sont invités à participer à des séminaires organisés sur des fermes propices ;

  • un "groupe de développement", composé de deux personnes, informe et conseille des paysans dans les régions montagneuses (notamment à Hradsha).

Elkana a en même temps développé un travail de formation et d’information qui entretient beaucoup de contacts au niveau national et international. L’association prépare des émissions à la radio et à la télévision et publie des articles dans différents journaux.

Le financement de l’ONG provient, en majeure partie, de trois organisations allemandes : Diakonisches Werk, Misereror, EZE, mais aussi de TACIS, de CORDAID et du FoE ("Know-how-Fund", Royaume-Uni)

Key words

organic farming, community participation, training, village


, Georgia, Tbilisi

Comments

De l’avis de plusieurs interlocuteurs connaissant bien les ONG en Géorgie (par exemple Minda Gachicheladze chargé d’une recherche sur les ONG en Géorgie par la Fondation Horizonti)le travail d’Elkana est exemplaire. Toutefois, il déçoit parfois les donateurs qui exigent que des projets soient réalisés dans un délai fixé d’avance. Inviter les gens à débattre de leurs problèmes, leur laisser le temps de prendre des initiatives eux-mêmes - cela dure plus longtemps. Et les résultats ne sont pas impressionnants du point de vue quantitatif. Mais ils signifient certainement un changement en profondeur dont on peut espérer qu’il porte plus de fruits sur le long terme.

Notes

Contact : Elkana, Biological Farming Association, Delissi III, nakveti N16, 380077 Tbilisi Georgia - Tél. (995 32)53 64 84 - Fax : (995 32)53 64 84 - elkana@access.sanet.ge

Entretien avec JORJADZE, Mariam; DUNDUA, Tamaz; DIASAMIDZE, Astma

Source

Interview

Dépliants distribués par Elkana.

CEDIDELP (Centre de Documentation Internationale pour le Développement les Libertés et la Paix) - 21 ter rue Voltaire, 75011 Paris, FRANCE - Tel 33 (0) 1 40 09 15 81 - France - www.ritimo.org/cedidelp - cedidelp (@) ritimo.org

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