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L’aide extérieure contribue à modifier les rapports femmes/hommes (Thiès, Sénégal)

Joséphine NDIONE, Benoît LECOMTE

04 / 1998

Joséphine Ndione, Secrétaire Générale du GRAIF (Groupe de Recherche et d’Appui aux Initiatives Féminines) : "Je peux dire que l’aide apportée a beaucoup renforcé la place des femmes dans la société parce qu’elles ont accès au crédit, et grâce à ce crédit, elles peuvent entreprendre des activités économiques : le petit commerce, la commercialisation des produits, la vente des produits artisanaux. Ou bien entreprendre des actions de saison sèche comme le maraîchage ou la transformation des produits. Ces revenus-là leur donnent beaucoup de possibilités de vendre, de se déplacer, d’acheter et de négocier avec d’autres groupements ou d’autres villages.

Si on observe la femme actuelle et qu’on compare avec celle d’il y a 15 ou 20 ans, on se rend compte que l’aide a renforcé nettement leur place. Celle qui vend est capable d’assurer au moins la dépense quotidienne. Ou bien elle est capable de payer la scolarisation de son enfant. Ou bien elle est capable de cotiser pour la mutuelle de santé ou d’acheter un sac de riz ou un complément de mil. Ainsi, vis à vis de son mari, elle a beaucoup plus de poids, elle est beaucoup plus considérée parce que le mari se rend compte de tout ce qu’elle apporte dans la famille.

Il y a peut-être 20 ans, on aurait dit : "l’homme est le responsable de la famille, c’est lui qui doit nourrir la famille, lui qui doit apporter tout." Et beaucoup de femmes attendaient tout de leur mari. Même si leur mari n’a pas les possibilités financières de supporter toute la gestion, la femme attendait de son mari qu’il paie tout. Cela dépend des ethnies mais chez nous, on a vécu cela pendant très longtemps. Aujourd’hui il y a une prise de conscience dans ce sens : la femme sait que si elle apporte un revenu en même temps que celui de son mari, elle sera davantage considérée par le mari et elle aura plus de poids dans la famille. Peut-être lui va apporter ce qu’il a mais elle sait désormais qu’elle doit "bouger", qu’elle a des capacités, qu’elle doit travailler comme son mari. Elle sait qu’ils sont, tous deux, responsables de la famille. Je pense qu’elles ont compris que le crédit et les actions économiques sont un moyen pour mieux se positionner dans la famille.

Cette nouvelle attitude des femmes et des hommes est renforcée si l’on donne assez de place aux femmes pour exprimer vraiment ce que sont leurs préoccupations et si on les associe aux décisions. Pour cela, on les écoute et on les laisse parler. Qu’elles prennent la parole, qu’elles puissent s’exprimer sur ce qu’elles veulent, ce qu’elles ressentent, ce qu’elles veulent devenir ; je pense que cette façon de faire renforce leurs capacités. Voici un exemple : si on fait une animation dans un village avec une animatrice-femme, peut-être que cela facilitera le changement souhaité. Mais cela n’exclue pas qu’on puisse travailler avec des animateurs masculins comme nous le faisons dans le programme d’alphabétisation. Ce sont des femmes qui doivent apprendre, mais on emploie des facilitateurs-hommes comme des facilitatrices-femmes, cela dépend des endroits; ici on trouve des femmes, là on trouve des hommes. Et vice-versa également : par exemple pour le programme-santé, on a des animatrices-femmes qui interviennent dans des villages et y travaillent avec les hommes. Ainsi, en travaillant avec les uns et les autres, peut-être que les hommes ne diront plus : "c’est une animatrice-femme, donc je ne discute pas avec elle, ou je n’échange pas avec elle".

Dans notre intervention, on privilégie les femmes mais on veille aussi à ne pas les marginaliser. Il y a des actions spécifiques-femmes mais pour des actions au niveau d’un village, telles que des actions de productions ou de santé, on travaille avec la communauté villageoise : hommes et femmes ensemble. Le fait de donner, dans les réunions mixtes, la parole aux femmes les met dans une autre en relation avec les hommes. Les faire réagir en présence des hommes, cela renforce beaucoup leurs capacités d’expression, leur maîtrise et aussi leurs capacités de décision. Car, en face des hommes, elles prennent quand même l’initiative de dire ce qu’elles pensent et comment elles veulent les choses. C’est une approche qui renforce fortement la capacité des femmes."

Key words

woman, social inequality, North NGO, gender, credit


, Senegal, Thies

Comments

Les petits crédits pour des activités économiques individuelles des femmes ont un effet sur la relation entre l’épouse et le mari, et entre les femmes et les hommes. Les façons d’agir de l’ONG sont variées puisqu’elle propose des activités menées soit spécifiquement avec les femmes, soit entre femmes et hommes. Ces activités et les modalités d’appui sont choisies pour favoriser l’évolution des attitudes : celles des femmes envers leurs propres capacités et rôles et celles des hommes envers l’autre moitié du monde.

Notes

Notre interlocutrice continue de présenter les actions de son association. Elle s’attache à présenter les avantages qu’elle apporte à la condition féminine, en soulignant le rôle des femmes dans la démarche de changement et de promotion.

Voir aussi les interviews de J. NDIONE, fiches DPH n° : 5.228; 5.229; 5.230; 5.236.

Entretien avec NDIONE, Joséphine, réalisé à Thiès en décembre 1998.

Source

Interview

GRAD (Groupe de Réalisations et d’Animations pour le Développement) - 228 rue du Manet, 74130 Bonneville, FRANCE - Tel 33(0)4 50 97 08 85 - Fax 33(0) 450 25 69 81 - France - www.grad-france.org - grad.fr (@) grad-france.org

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