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Johan Obdola, une vie dédiée à la lutte contre le narco-trafic

Lutter contre la drogue, telle est la mission que s’est fixée Johan Obdola. Le problème de la drogue n’est pas simple et s’étend aux domaines économique, politique et social. Il est impossible de mettre fin aux cartels s’il n’existe pas de réelle volonté politique et une collaboration entre les pays.

Ouadeba DJENEBA

12 / 2001

C’est l’histoire d’un homme qui a risqué sa vie et la risque toujours, au nom de ses convictions et du bien-être de son pays. Johan Obdola est vénézuélien et lutte contre les problèmes de drogue. En 1993, il a été appelé par son gouvernement pour prendre à la fois la tête de la Direction régionale de prévention et d’éducation sur la drogue, et le programme de répression policière et militaire contre le narco-trafic. Son action était de recevoir et de décoder les rapports des services secrets vénézuéliens, puis de coordonner les actions à mener avec les policiers et les militaires. Toutefois, outre cette tâche administrative, Johan s’est tout de suite impliqué sur le terrain. Une des facettes de cet homme apparaît dans une phrase qu’il a dite : "Pendant les opérations, il me tenait à coeur que, malgré tout ce que les trafiquants avaient fait, l’on respecte leurs droits, car ce sont toujours des êtres humains." Pour mener à bien son travail, Johan Obdola a suivi une formation avec la police vénézuélienne, avec la "Drug Enforcement Administration" américaine et les Marines américains. Il travaillait aussi en collaboration avec Scotland Yard, la police canadienne, et un programme européen de contrôle chimique. Son rôle était, d’une part, de coordonner et de diriger les forces militaire et policière vénézuéliennes, et d’autre part, de prendre contact avec les différentes personnes qui s’impliquaient dans la lutte contre le narco-trafic. Au début, son champ d’action était circonscrit au Venezuela, avant de s’étendre au niveau international.

Cruel problème de santé publique, le trafic de drogue dépend à la fois de la configuration des organisations criminelles (les cartels) et des politiques extérieures du pays. Le poids croissant du narco-trafic peut, en effet, s’expliquer en trois points. Premièrement, auparavant, il était "relativement aisé" de lutter contre les cartels, car ces derniers étaient territorialement localisés. Aujourd’hui, ce sont des organisations tentaculaires qui étendent leurs branches jusqu’en Asie, en Europe, en Afrique. Par exemple, les groupes de narco-trafic de Colombie travaillent main dans la main avec la mafia russe et l’Armée républicaine irlandaise (IRA). De ce fait, ils sont plus forts et pratiquement impossibles à appréhender. Selon Johan Obdola, "avant, au moins, on savait où et contre qui se battre, car les cartels de la drogue étaient connus par le pouvoir en place. Mais aujourd’hui, la donne a changé, il y a une véritable mondialisation de ces cartels." L’autre raison de la croissance du trafic dépend de la politique extérieure des États d’Amérique Latine, qui ne souhaitent pas lutter de manière efficace contre la drogue. Ces pays n’ont pas, selon Johan Obdola, les moyens de s’insérer dans le commerce international des armes. Se fournir sur le marché leur coûterait trop cher. Et les aides qui leur sont apportées sous forme militaire ou économique, bien loin de résoudre le problème, ne sont là que pour l’entretenir. Par exemple, explique Johan Obdola, "si je fais partie des forces armées en Amérique Latine et que je me donne comme objectif d’enrayer le problème du narco-trafic de manière ferme, cela aura comme corollaire que je ne recevrai plus d’aide des Etats-Unis." C’est aussi pour cela que les pays latino-américains ne luttent pas farouchement contre les narco-trafiquants. Leur semblant de lutte leur sert simplement à obtenir des subsides des Etats-Unis qui, sans cela, cesseraient de leur fournir des armes à bas prix. La meilleure manière de recevoir des armes devient alors de clamer que l’on lutte activement contre la drogue... Enfin, le dernier obstacle au combat contre la drogue, peut-être le pire, est l’implication de nombreux dirigeants dans les trafics. De nombreuses instances internationales et des partis politiques tirent profit du narco-trafic et n’hésitent pas à faire pression sur ceux qui décident de s’attaquer au problème. Les enjeux économiques sont tels qu’il peut paraître impossible de mettre en oeuvre une politique de lutte. Ce que souhaite Johan Obdola est la mise en place d’un Tribunal pénal international chargé de résoudre les problèmes du narco-trafic, et l’homogénéisation des politiques américaine et européenne qui, pour l’instant, divergent.

Depuis 1996, Johan Obdola est réfugié au Canada, car au fur et à mesure de ses enquêtes, il se rendait compte que des élites judiciaires et politiques étaient impliquées dans les cartels (complaisance, pots de vin, etc.). Il a dénoncé cet état de fait au Congrès national et a, dès lors, reçu des menaces de mort et échappé à plusieurs attentats. Pourtant, il va bientôt retourner au Venezuela, et à la question que je lui ai posée sur la dangerosité de sa démarche, il a répondu : "Je ne suis pas un héros, j’ai juste fait mon devoir. Il y a beaucoup de gens qui font la même chose que moi dont on ne parle pas. Si personne n’agit, le problème de la drogue ne sera jamais résolu. C’est pour cela que je retourne au Venezuela. C’est mon pays, je l’aime et je sais que je peux être utile là-bas, même si j’y risque ma vie. Je souhaite recevoir l’appui des personnes que j’ai rencontrées ici, à l’Assemblée Mondiale des Citoyens, car je compte lutter contre la drogue non plus de manière répressive mais préventive.".

Key words

drugs, fight against traffics, geopolitics of drugs, international relations, mafia


, Venezuela, United states, Latin America, Russia,

Comments

J’ai été bouleversée par l’histoire et le courage tranquille et modeste de Johan Obdola. Il est étonnant de voir la force de conviction de cet homme qui a dédié sa vie à la lutte contre la drogue. J’ai tenu à rendre hommage à cette personne qui est maintenant pour moi l’incarnation du héros moderne.

Notes

Entretien avec Obdola Johan

Fiche rédigée dans le cadre de l’Assemblée Mondiale des Citoyens, Lille, décembre 2001.

Entretien avec OBDOLA, Johan

Source

Interview

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