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Le riz fera-t-il du Sahel une saline ?

Mohamed Larbi BOUGUERRA

05 / 1994

La disponibilité du crédit bon marché, des terres et de l’eau à profusion font que bureaucrates, citadins, commerçants et même des nomades s’adonnent maintenant au Sahel à la riziculture. Les agences internationales comme le FMI encouragent ces activités car elles veulent rompre avec le pâturage traditionnellement pratiqué sur les terres proches des rivières sahéliennes. Pour nombre d’observateurs, les agences ne semblent guère se soucier des recommandations du Sommet de la Terre tant la riziculture irriguée dans le Sahel leur paraît éloignée d’un développement durable et susceptible d’endommager irréversiblement les sols. Le Mali, le Sénégal, la Mauritanie, le Niger et le Burkina-Faso sont en fait soumis à "l’ajustement structurel" de la Banque Mondiale et du FMI. Pour bénéficier de crédits, il leur est demandé d’éliminer toutes les barrières douanières, de supprimer les subventions aux produits agricoles essentiels, de réduire les dépenses publiques et de privatiser les entreprises étatiques. Les terres de parcours et communales, exigent en outre les financiers de Washington, doivent être privatisées. Les spécialistes affirment qu’il en résulte des catastrophes: ces politiques encouragent ceux qui veulent s’enrichir vite et à bon compte de pratiquer une riziculture irriguée sans drainage et d’abandonner au bout d’une année seulement parfois des sols dont les systèmes d’irrigation sont de très mauvaise qualité. Le riz n’a été introduit que dans les années 20 au Mali, en 50 au Sénégal et en 1980, il atteint la Mauritanie. Contrairement à l’Asie, le riz ne fait pas partie intégrante de la vie rurale et des traditions sahéliennes. Sa popularité vient du fait qu’il est plus facile à préparer et plus savoureux que le millet. Sa production est en croissance continue au Sahel. Mais cette croissance paraît non souteanble et pourrait endommager les sols d’autant que l’on pratique la culture inondée en sol argileux ou alcalin. Il en résulte de sérieux problèmes de salinité quand le drainage n’est pas correctement fait. Sous le soleil sahélien, l’évaporation rapide des eaux aggrave les choses. Les nouveaux venus à la riziculture font des drainages rudimentaires et visent d’abord à établir un droit de propriétépour accéder aux prêts et aux avantages consentis par l’Etat. Les compagnies agrochimiques les incitent à utiliser moult engrais et herbicides pour augmenter les rendements . Mais n’ayant aucune notion d’agriculture, ils aboutissent souvent à des fiascos. La fertilité des sols est affectée et la table remonte. Autre fléau: la bilharziose due à la multiplication des canaux d’irrigation où prolifèrent les mollusques vecteurs de la maladie. L’irrigation a de beaux jours au Sahel si elle est pratiquée à bon escient et si on introduit des variétés convenables et des pratiques utiles pour le petit exploitant.

Key words

phytosanitary processing, rice, irrigation, soil sterility


, Sahel, Mali, Senegal, Niger, Burkina Faso, Mauritania

Comments

WARDA, un institut de recherches agricoles à Saint Louis du Sénégal essaie de mettre au point des variétés modérément tolérantes aux sels, sans cependant encourager à la salinisation des sols. Les observateurs notent avec une amère ironie que la Banque Mondiale a inauguré une nouvelle politique exigeant des PVD de fournir des plans de protection de l’environnement en vue d’une agriculture durable. Dans le même temps, cet organisme pratique une toute autre politique au Sahel. Les ravages d’une certaine riziculture pour "affairistes"-avec pour conséquence la stérilisation irrémédiable des sols dans la majorité des cas - continueront à frapper au Sahel tant que la politique d’ajustement structurel sera appliquée avec la bénédiction de l’Etat.

Notes

Titre original : "Will rice turn the Sahel to salt"

Source

Articles and files

MADELEY, John, IPC Magazines Ltd in. NEW SCIENTIST, 1993/10/09 (ROYAUME UNI)

legal mentions