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diálogos, propuestas, historias para una Ciudadanía Mundial

Avoir 20 ans à Bogota

Pierre Yves GUIHENEUF

01 / 2002

Avoir vingt ans à Bogota, est-ce posséder un téléphone portable et une voiture de luxe pour arpenter les banlieues chics de la ville ? Est-ce vivre dans la rue des quartiers misérables et finir assassiné par des milices paramilitaires au terme d’une rapine qui aurait mal tourné ? Est-ce quitter une famille de la classe moyenne pour rallier les mouvements de guérilla qui occupent "la montagne" : les collines boisées du pays ?

Pays le plus violent au monde, la Colombie offre de terribles contrastes à sa jeunesse. Les photos de Philippe Revelli laissent le charme de l’insouciance côtoyer le désespoir d’un avenir bouché. Jeunes mannequins d’une agence de tops models ou actrices encore adolescentes d’une série télévisée pourraient donner le change et laisser croire à un pays latin enchanteur. Mais la tension qui règne dans la rue est palpable : gardes du corps armés de pistolets mitrailleurs, contrôle d’identité policiers, ruelles étroites des bidonvilles, mémorial aux victimes des groupes armés. Et puis il y a ceux et celles qui ont choisi la clandestinité et qui campent, jamais éloignés de leur fusil, dans des forêts accidentées.

Maurice Lemoine, dans son introduction, rappelle ce que l’on ne voit pas : la violence des narco-traficants qui défient ouvertement l’Etat, les 80 pour cent des paysans du pays qui vivent en-dessous du seuil de pauvreté, les milices para-militaires qui éliminent les journalistes trop curieux et les militants des droits de l’homme.

Mateo, issu des quartiers pauvres de Ciudad Bolivar, a échappé de peu à un sort banal : suite à une altercation, lui et l’un de ses amis ont abattu un commerçant. Son copain a été pris par la police et exécuté sans procès dans sa cellule : la victime était un ancien flic. Encore un délinquant de moins. De la vingtaine de brigands qui courraient avec Mateo dans les rues du bidonville quand il était gamin, il n’en reste que trois. Les autres ont fait les frais de la guerre des gangs ou des opérations de "nettoyage social" des milices privées. Mais la vraie chance de Mateo, c’est d’être un jour repéré par un cinéaste qui tourne une série télévisée sur une bande de jeunes truands : ceux qu’on appelle "los desechables" : les jetables, ou les déchets. Sur le plateau, il côtoie les starlettes et la jeunesse dorée de Bogota : incompréhension, choc de deux mondes La série a du succès. Cela vaut à Mateo de devenir la coqueluche des gamins de son quartier et de susciter chez les jeunes de son âge des jalousies qui lui vaudront un tabassage en règle. Mais il s’accroche bec et ongles à la chance qu’on lui offre : le cinéma, c’est l’occasion d’échapper à un destin sans relief et peut-être à une mort violente.

Daisy n’a pas eu ses règles depuis deux mois et espère être enceinte. Comment en être sûre ? Dans la montagne, pas de test de grossesse. Caressant la crosse de son fusil mitrailleur AK-47, son joli visage penché sur le côté, elle rêve à son bébé. "J’apprécie la vie ici, dit-elle. Ce n’est pas comme à Bogota, où l’on a toujours peur de se faire agresser". Elle n’est pas venue à la guérilla par conviction. Alors que sa famille - classe moyenne - vit dans la capitale, elle passe quelques jours chez sa grand’mère qui vit à la campagne dans une zone contrôlée par l’ELN, l’Armée de libération nationale. C’est lors de la fête du village qu’elle rencontre le beau Roberto, commandant guérillero. Le lendemain, elle décide de ne plus rentrer chez ses parents. Plusieurs de ses compagnes sont dans le même cas, d’autres ont rallié la clandestinité par choix politique.

Ce qui n’empêche pas la guérilla de glisser d’un idéal de changement social vers les intérêts commerciaux liés à la drogue. La banque mondiale estime que le trafic rapporte plus d’un milliard de dollars par an aux Forces armées révolutionnaires de Colombie, l’un des deux principaux mouvements qui emploie quelques 12 000 combattants pour surveiller les champs de coca. A ce compte, les autres activités ne pèsent pas lourd, même le café, dont la Colombie reste le deuxième producteur mondial.

Mais face à une police corrompue, à un Etat impuissant, aux mafias de la drogue alliées aux mouvements dits subversifs, Bogota reste un lieu de résistance, où des groupes s’organisent pour lutter contre l’emprise des puissants et s’insurgent contre le recours quotidien à la violence. En 2000, les Etats-Unis ont conçu un plan militaire de grande ampleur censé mettre fin à tous les désordres qui empoisonnent la Colombie. Les citoyens le considèrent comme une ingérence insupportable et l’Union européenne comme un programme inefficace.

Palabras claves

joven, desigualdad social, violencia, corrupción, guerrilla, guerra civil, droga y violencia, pobreza, droga, niño de la calle


, Colombia

Comentarios

Un livre superbe et poignant, comme beaucoup dans cette collection. Les contrastes sont saisissants entre les parcours décrits et entre les jeunes photographiés.

Fuente

Libro

REVELLI, Philippe, Avoir 20 ans à Bogota, C.L. Mayer - Alternatives, 2001 (France), 94 p.

GEYSER (Groupe d’Etudes et de Services pour l’Economie des Ressources) - Rue Grande, 04870 Saint Michel l’Observatoire, FRANCE - Francia - www.geyser.asso.fr - geyser (@) geyser.asso.fr

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