español   français   english   português

dph participe à la coredem
www.coredem.info

rechercher
...
dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

Le Blayais dans la tempête ou merci au bogue de l’an 2000

Monique SENÉ

01 / 2004

Le 27 décembre 1999 la tempête qui traverse la France atteint le site du Blayais où 3 tranches sur quatre sont en production, la quatrième est en arrêt maintenance. Vers 18 h 30 les premiers effets de la tempête provoquent l’interruption de l’alimentation électrique auxiliaire 225 kV des quatre tranches. Le réseau 400 kV reste disponible pour évacuer l’énergie produite par les 3 réacteurs en production et assurer l’alimentation de la tranche 3 à l’arrêt.

Vers 20 h 50, au plus fort de la tempête, une surtension sur le 400 kV provoque l’arrêt des réacteurs 2 et 4. Les diesels de secours démarrent automatiquement pour assurer l’alimentation électrique. Par contre 1 et 3 restent connectés au 400 kV. Les diesels ont démarré merci au bogue de l’an 2000…

Mais la tempête fait toujours rage et l’eau monte dans les réacteurs 1 et 2 pour cause de digue insuffisante et d’une mauvaise protection de leurs galeries internes. L’eau s’infiltre via une porte coupe-feu déformée puis ouverte sous l’effet de la pression, dans les galeries de la paire 1/2. L’eau a circulé de trémies en trémies noyant les diverses galeries électriques et celle de précontrainte (réacteur 1) sous le réacteur et ce jusqu’aux puisards du bâtiment combustible.

La tranche 1, toujours en fonctionnement, s’arrête (0 h 30) en raison de l’encrassement des tambours filtrants de la prise d’eau : en clair l’eau charrie des tas de cochonneries qui bouchent les grilles et le refroidissement n’est plus assuré. Toute la nuit les équipes vont se battre pour pomper l’eau et essayer de récupérer les possibilités de refroidissement du réacteur 1.

A 9 h le Plan d’Urgence Interne est déclenché car le réacteur, alimenté par le 400 kV est certes refroidi par ses générateurs de vapeur ce qui assure l’évacuation de la puissance résiduelle du réacteur (25 MW). Mais il n’y a qu’une voie de secours disponible pour assurer le refroidissement des joints des pompes primaires. De plus les pompes du circuit d’injection de secours (RIS) et les pompes du circuit d’aspersion de l’enceinte (EAS) sont noyées sous 1,5 m d’eau.

Il faudra attendre encore 2 h (soit 11 h du matin) pour que le réacteur 1 soit enfin sur son circuit de refroidissement à l’arrêt (RRA) (température 177 °C et pression inférieure à 32 bars). Sa puissance résiduelle est alors de 20 MW.

La tranche 1 a donc pendant 10 h fonctionné sans filet. La crainte du bogue de l’an 2000 a heureusement aidé : les équipes avaient été entraînées et ont travaillé comme des chefs.

N’empêche, la tempête a frappé et même s’il s’agit finalement d’un simple incident, ce fut très juste. Comme écrit l’Autorité de sûreté « en raison d’une part de la dégradation notable de la fiabilité de matériels importants pour la sûreté, et d’autre part de l’indisponibilité totale de plusieurs systèmes de sauvegarde, l’incident, d’abord classé niveau 1 de l’échelle INES, a été reclassé au niveau 2 le 29 décembre ». Le réacteur n’a tout de même été ramené en arrêt froid qu’au bout de 10 heures et pendant tout ce temps, il n’y avait aucun moyen supplémentaire pour refroidir le réacteur : il est clair que le personnel a travaillé sans filet mais rien de plus n’est arrivé… Tant mieux et bravo pour les équipes techniques d’EDF.

Merci aussi aux exercices de préparation du bogue mais attention à tenir compte des avis sur les problèmes d’eau : la digue était trop basse et les bâtiments étaient toujours inondables contrairement aux affirmations d’EDF. Or, l’Autorité de Sûreté avait demandé le rehaussement des digues mais EDF avait négocié un délai, délai à l’origine de l’inondation pouvant conduire à un désastre.

Il ne faut pas compter sur la chance quand il s’agit de sûreté.

Mots-clés

centrale nucléaire, risque nucléaire, catastrophe nucléaire


, France

dossier

Le réacteur nucléaire EPR : un projet inutile et dangereux (Les cahiers de Global Chance n°18, janvier 2004)

Notes

Monique Sené est présidente du GSIEN - Groupement de Scientifiques pour l’Information sur l’Énergie Nucléaire

Global Chance - 17 ter rue du Val, 92190 Meudon, FRANCE - France - www.global-chance.org - global-chance (@) wanadoo.fr

mentions légales