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L’organisation, la législation et les droits des pêcheurs aux Philippines

Irène BENANI HAURI

04 / 1994

On peut voir dans les anciennes dispositions législatives philippines concernant la pêche et datant de 1975 qu’elles visaient surtout à développer la pêche industrielle et l’utilisation des ressources de la mer, et pas du tout à garantir les droits des pêcheurs. On peut résumer en six points les raisons pour lesquelles les pêcheurs philippins trouvaient ces dispositions contraires à leurs intérêts.

1. Ces lois visaient surtout à favoriser une utilisation commerciale des ressources de la mer plutôt que la satisfaction des besoins essentiels de la population. Elles favorisaient les investisseurs étrangers, la pêche industrielle et limitaient l’accès aux ressources pour les artisans pêcheurs locaux.

2. Cette politique d’exploitation commerciale massive ne profitait qu’aux grands investisseurs et aux gens du pouvoir.

3. Elle a largement contribué à la dégradation des ressources (surpêche, destruction de la mangrove).

4. La centralisation de la gestion de la pêche à Manille a découragé la participation des pêcheurs à la gestion des ressources. Sans cette centralisation, beaucoup d’initiatives locales auraient suffi pour régler des problèmes spécifiques.

5. La violation des lois au détriment des pêcheurs n’a pas été strictement réprimée, car le gouvernement a toujours accepté des arrangements avec les agents de la pêche industrielle.

6. Tous les projets concernant la pêche ont été mis en oeuvre sans tenir compte des données culturelles et des besoins sociaux.

En réaction à cette situation, les pêcheurs se sont peu à peu organisés, structurés, alliés à d’autres acteurs de la vie économiques. Une quantité impressionante d’organisations de pêcheurs ont été créées après la Loi Martiale. Elles ont toutes commencé par défendre surtout les conditions de travail et les revenus. Peu à peu, elles se sont senties concernées par des questions plus générales touchant la pêche, la gestion des ressources, l’environnement. Cette prise de conscience qui s’est développée parmi les pêcheurs rejoint la prise de conscience politique qu’on retrouve aux Philippines à tous les niveaux, mais surtout parmi les groupes sociaux concernés par le développement (églises, écoles, groupes professionnels, ONG, etc...)et qui réfléchissent à des moyens d’action pour un développement alternatif.

Avec l’avènement d’une nouvelle démocratie, toutes ces organisations de pêcheurs ont espéré la mise en place de mesures législatives plus favorables, conformes à la nouvelle constitution qui garantit de nouveaux droits aux Philippins. Les pêcheurs veulent que le gouvernement mette en oeuvre une utilisation durable des ressources de la pêche pour satisfaire les besoins de base et qu’il développe une industrie de la pêche vraiment philippine. Le thème central de leurs propositions est que les pêcheurs puissent participer aux prises de décisions à travers des conseils locaux, surveiller la mise en application des lois de la pêche et veiller à ce que leurs zones de pêche ne soient pas victimes des ravages de la pêche industrielle. Ils suggèrent la création d’un conseil national de gestion de la pêche. Les pêcheurs ont pris conscience des immenses difficultés pour changer la loi. Après des années de luttes dans l’arène législative, leurs recommandations n’avaient toujours pas été prises en compte. Seules des organisations fortes et la conviction que leur cause est juste arriveront à faire reconnaître leurs droits.

Mots-clés

pêcheur, pêche artisanale, pêche industrielle, organisation populaire, pêche, organisation socioprofessionnelle, conditions de travail


, Philippines

Commentaire

Les organisations de pêcheurs se sont mobilisées pour élaborer, avec l’appui de juristes professionnels et dans un effort permanent de dialogue avec la base, une proposition de Code de la Pêche. Mais ce code tarde à être mis en oeuvre. Les chalutiers, japonais comme philippins, continuent librement à épuiser les ressources, alors que le développement de l’aquaculture intensifie la destruction du littoral. Tous deux empiètent sur les territoires d’activité des petits pêcheurs dont les organisations lient, plus que par le passé, autodéfense socio-économique et protection de l’environnement Elles élaborent ainsi de nouvelles conceptions du développement exigeant le contrôle démocratique de l’usage des ressources naturelles.

Notes

Titre de l’article : "Organization, Legislation and the Rights of Fishworkers in the Philippines". Edition spéciale pour la Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement

Source

Articles et dossiers

CURA, Nenita; VENTURA, Jose, ICSF in. SAMUDRA REPORT, 1991/05 (INDE), Numéro spécial

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