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La mise en place des mutuelles d’épargne et de crédit par le CREDETIP, ONG d’appui-conseil sénégalaise

Sophie NICK

02 / 1996

Mamadou Wade est le spécialiste du crédit et de l’épargne du CREDETIP, une ONG sénégalaise d’appui-conseil créée en 1987 qui soutient le Collectif National des Pêcheurs Sénégalais (CNPS).

- Mise en place. "Le premier congrès du CNPS, a formulé des recommandations concernant la mise en place de programmes d’épargne. L’idée était de canaliser l’épargne au niveau de la pêche de façon à créer des fonds de garantie et des fonds de prévoyance. C’était la première fois qu’on mettait en place un tel programme au Sénégal et peut-être même en Afrique. Nous avons fait un travail de sensibilisation, de formation et d’information qui a duré six mois. Les pêcheurs, qui sont dans un secteur informel, savent qu’il y a pas mal d’épargne en circulation au niveau des plages. Ils n’ont pas accès au crédit et ont donc développé des systèmes alternatifs. Pour avoir des chances d’accéder à un prêt, il faut passer par les G.I.E. et cela peut durer plusieurs mois, voire des années. Donc, les pêcheurs ont fait le constat que ce n’est pas avec les G.I.E. qu’ils vont développer ça mais en prenant eux-mêmes des initiatives en collaboration avec des partenaires via les ONG. C’est ce qui s’est fait à travers les mutuelles. Aujourd’hui, il y a plus de 22 mutuelles qui regroupent 1500 adhérents dont 600 femmes. C’est différent des tontines où chacun verse une mise toutes les fins de mois ou toutes les semaines pour le bénéfice d’une personne désignée ou tirée au sort. L’épargne est collectée périodiquement et "stérilisée" dans le compte bancaire de la mutuelle qui doit servir de fond de garantie pour la réalisation de projets."

- Sensibilisation. "Ca a été difficile à mettre en place. Il fallait d’abord faire un travail de sensibilisation et les lieux de débarquement pour la pêche sont multiples et inaccessibles. Cela pose des problèmes de transport et de personnel. Faire ce travail en permanence, régulièrement, nécessite du monde et aussi du matériel. Les gens nous écoutent parce que nous sommes issus du milieu des pêcheurs. Il n’est pas toujours facile de travailler avec eux. Dans les enquêtes, il faut pouvoir vérifier la véracité des informations, il faut instaurer une relation de confiance. Depuis des années et des années, de nombreuses personnes sont passées prétendant vouloir aider les pêcheurs. Il y a eu des expériences de coopératives, de groupements villageois et, au cours de ces expériences, les pêcheurs ont été déçus. Dans ces structures, il y avait la main de l’Etat et les pêcheurs n’étaient pas impliqués dans la gestion. Bien que moins disposés maintenant à collaborer avec un organisme, ils ont compris que ce projet était différent parce que le contrat a été fait par eux. Aujourd’hui, nous sommes confrontés à un problème car tous les membres du CNPS ne sont pas membres des mutuelles. Actuellement, les demandes d’adhésion viennent de toutes parts mais ce n’est pas possible, pour le moment, de répondre à tous en raison d’un déficit d’animation sur le terrain."

- Reconnaissance. "Actuellement, les mutuelles sont tolérées mais ne sont pas agréées. C’est un problème politique. Il faut que le projet de mutuelles soit voté par le parlement de huit pays d’Afrique de l’Ouest dans le cadre d’un programme d’appui à la réglementation des mutuelles d’épargne et de crédits. Le décret n’a pas été signé mais nous avons poussé au niveau des gouvernements pour que ça soit fait et nous avons réussi à faire remonter cette loi au niveau de l’Assemblée Nationale du Sénégal."

- La formation. "Pour qu’un système soit mis en place et qu’il fonctionne pour les pêcheurs et les femmes qui sont dans le secteur, il faut des taux raisonnables. C’est quelque chose qui est en train de se mettre en place et qui nécessite de la formation parce qu’il faut que ces mutuelles soient gérées par des gens capables. Un audit réalisé par un bureau d’étude de Dakar sur la sollicitation de bailleurs de fonds extérieurs a évalué notre programme triennal. Une des recommandations concernait le manque de formation pour les mutuelles."

Mots-clés

pêche artisanale, mer, crédit, organisation de pêcheurs, ONG, caisse d’épargne et de crédit, formation, Etat et société civile


, Sénégal

Commentaire

La mise en oeuvre de mutuelles d’épargne et de crédit fait suite au congrès organisé par le Collectif National des Pêcheurs Sénégalais qui a officialisé cette organisation. Cette action semble en bonne voie alors que divers projets se sont succédé sans succès mais sans que l’initiative vienne des pêcheurs eux-mêmes.

Notes

Entretien réalisé par Sophie Nick au CEASM, à Paris, dans le cadre de la capitalisation d’expérience de cette association. Le CEASM et le CREDETIPfont partie d’un collectif d’ONG, l’ADEPA, qui est l’agence d’exécution d’un programme régional en Afrique de l’Ouest sur la valorisation des produits de la mer.

Adresse du CREDETIP : BP 3916, Dakar, Sénégal.

Entretien avec WADE, Mamadou

Source

Entretien

CEASM (Association pour le Développement des Activités Maritimes) - Le CEASM a arrêté ses activités en 2001. - France

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