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Minorités autochtones et colons russes dans l’oblast de Tyumen

Problèmes démographiques et sociaux

Alexeï LIGOTSKI

10 / 1996

L’oblast de Tyumen est peuplé de 3,1 millions d’habitants, répartis sur 3 subdivisions régionales: les deux districts autonomes nordiques (D.A. des Khantys-Mansis et D.A. des Iamalo-Nenets)et le "Sud de l’Oblast", organisé autour de la capitale régionale, Tyumen. Le peuplement de cette région commence à la fin du XVIème siècle mais il s’intensifie considérablement à partir des années 1960 et la transformation de cet oblast, qui existe sous sa forme actuelle depuis 1944, en zone pionnière d’extraction d’hydrocarbures, la production de ce "troisième Bakou" ayant assuré à l’URSS sur le déclin des moyens d’action encore considérables dans les années 1980. On a assisté à une véritable explosion urbaine sur les rivages de l’Ob, jusque dans la zone subarctique, au delà du cercle polaire. Les districts autonomes, créés en 1930 selon les principes d’une politique de nationalités, ont été entre 1979 et 1989, les régions de l’URSS ayant connu le plus fort taux d’accroissement de la population, atteignant 207%, et provoquant la création ex-nihilo de nombreuses villes, dans des conditions extrêmes, notamment dans la zone gazière: Nadym (50000 habitants), Noviy Ourengoï (95000 habitants). La croissance des villes du bassin de l’Ob, qui avait commencé plus tôt, continue jusqu’en 1989 (Surgut avait 6000 habitants en 1959 et 248000 en 1989 / 254000 aujourd’hui - Nijnivartovsk est passé de 0 habitants en 1959 à 242000 aujourd’hui).

Les conséquences de cet afflux de population sont diverses:

1)Les infrastructures n’ont pas suivi et les conditions de logement de ces techniciens, cadres, et de leurs familles sont souvent très précaires. De plus, ces familles, qui avaient été attirées par les hauts salaires de l’époque pionnière et soviétique, sont aujourd’hui touchées de plein fouet par la crise, et donc la baisse de leur pouvoir d’achat, provoquant une grogne sociale de plus en plus forte (salaires non payés, vie plus chère que dans le reste du pays, enrichissemnt d’une petite partie de la population...). Les menaces de grèves ont été une arme de poids pour ces "neftianiki" (pétroliers)afin d’obtenir du pouvoir un relatif maintien de niveau de vie et de structures sociales.

2)Mais la tragédie de ces populations sacrifiées à la rente pétrolière n’est pas comparable à celle que vivent les populations autochtones dont le poids dans la population globale de l’oblast n’a cessé de diminuer et dont l’existence en tant que cultures originales est menacée, voire condamnée selon certains spécialistes locaux, comme Anatoli Ameltchuk, écrivain et président de la télévision régionale, "Region Tyumen". Tout d’abord les Nentsys, ou Nenets-Samoyèdes, sont encore près de 17000 sur une population totale dans le D.A. le plus nordique (Iamalo-Nenets)de 480000 habitants. Une partie de ce peuple est encore nomade et vit de l’élevage du renne dans la toundra, mais les pâturages sont le plus souvent localisés sur des immenses réserves de gaz naturel et la préservation de leur milieu naturel est l’enjeu principal de leur survie en tant que représentants d’une entité culturelle et lingistique. Déjà, la soviétisation avait considérablement détruit ces sociétés dites "ouraliennes", par la persécution des chamanes ou la mise en internats des enfants de nomades. Aujourd’hui, la vodka et la violence terminent cette lente agonie. Pour les populations vivant plus au sud, les Khantys et les Mansis, le sort est quasiment le même; Ceux-ci sont respectivement 12000 et 7000 et pèsent moins de 2% dans la population du D.A. (1,300000 habitants).

3)La société régionale est complètement multiculturelle, grâce à l’apport massif de techniciens des espaces pétroliers du Tatarstan, de la Bachkirie ou de l’Azerbaïdjan, tous de culture musulmane, s’ajoutant à une population tatare de Sibérie représentant 8% de la population de l’oblast (250000 personnes). Or, l’approche des problèmes régionaux tient trop peu compte de cette composition et accentue le caractère explosif de la situation.

Mots-clés

peuplement, minorité ethnique, population urbaine, ethnologie


, Russie, Tyumen

Commentaire

L’essor démographique est stoppé aujourd’hui dans la région et il n’est pas impossible qu’à moyen terme commence une décrue, dont les conséquences ne seraient pas forcément positives puisque maintenant, un des atouts de la région est l’existence d’un marché intérieur solide. De plus, le poids des revendication pour un effort de l’Etat et des structures régionales afin de poursuivre jusqu’au bout l’aménagement commencé s’en trouverait forcément amoindri.

Notes

Les titres des documents cités dans cette fiche ont été traduits du russe ou transcrits en caractères latins. Pour toute recherche, s’informer auprès de France-Oural.

Source

Livre

Tyumenskym oblastnym komitetom gossoudarstvennoï statistiki, Tyumenskaia oblast v tsifrakh - 95, 1996 (Russie); Atlas de la Russie et des pays proches, Reclus/ La Documentation française, 1995

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