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dialogues, propositions, histoires pour une citoyenneté mondiale

Les enfants du faiseur de pluie

Une saga familiale dans l’ancienne Afrique des Grands Lacs

Robert DOUILLET

08 / 1999

L’union de Bwana (monsieur)Myombekere (celui qui fonde une famille)et Bibi (madame)Bugonoka (le malheur survient à l’improviste)reste sans enfants, malgré leur amour réciproque. Les parents de Bugonoka reprennent alors leur fille, sujette selon eux à de trop nombreux dénigrements dus à sa stérilité. Mais Myombekere ne peut vivre sans sa femme, et grâce à sa droiture et sa détermination, surmontera de nombreux obstacles pour la récupérer.

A l’aide d’un traitement efficace prescrit par un guérisseur, Bugonoka tombe enfin enceinte et donnera naissance à un premier garçon.

Mots-clés

ethnologie, tradition, agriculture hors sol, agriculture traditionnelle, médecine traditionnelle


, Afrique, Tanzanie

Commentaire

Les "Enfants du faiseur de pluie" est la première partie de la saga d’une famille de l’ancienne Afrique, avant l’arrivée de toute influence extérieure, colons ou marchands arabes. Elle se déroule dans une région des Grands Lacs, dans le pays Kerewé. Ce récit sera suivi par un second tome, "Le tueur de serpents".

Cette saga est en fait un roman semi-biographique écrit au départ en kerewé, langue locale, puis traduit en swahili afin de pouvoir être publié, avant une nouvelle traduction en allemand et enfin en français plus de 15 ans plus tard.

Mais c’est surtout un roman ethnologique permettant d’explorer tous les domaines de la culture : le social, le politique, l’économique, le religieux, le judiciaire, le médical, le géographique, le météorologique, l’astrologique, la faune et la flore... Les proverbes sont nombreux et illustrent la richesse de cette culture.

Avec des mots simples et un style léger, on se plonge dans une analyse approfondie de la structure de base de la société kerewé, se délectant de situations et de dialogues aussi cocasses que délicieux. On s’enrichit d’une sagesse universelle quand on apprend que - par respect - les gendres et les belles mères doivent s’éviter mutuellement, ou que le mariage entre cousins est interdit sous peine d’une maladie inguérissable. On s’amuse en lisant les descriptions de chasse aux hippopotames, ou celle d’un faiseur de pluie, véritable sorcier habillé de morceaux de peaux d’animaux, prononçant des flots de paroles terrifiantes avant de supporter un éclair formidable qui, non seulement aveugla tout le monde, mais tua sur le coup trois de ses propres vaches. On s’étonne de la réussite du guérisseur qui, grâce à des plantes, des incantations et les préconisations d’usage qui les accompagnent, soigne la stérilité de Bugonoka. On est rassuré par l’esprit d’équité du chef à l’occasion du jugement de Myombekere qui avait laissé paître malencontreusement ses vaches dans le champ d’un voisin coléreux et prompt à se faire justice lui-même...

Mais on apprend aussi beaucoup sur les relations entre les hommes et les femmes qui se basent sur un conte ancestral très étonnant :

Au départ, les hommes et les femmes vivaient séparés, heureux et joyeux. Les hommes cultivaient la terre pour se nourrir et ne mangeaient pas de viande, celle ci étant tabou. Les femmes, ne mangeaient que la chair des animaux de la forêt, et pour cela élevaient des chiens qui, chaque jour, tuaient et ramenaient leurs proies, la nourriture végétale étant tabou. Mais les animaux ravageaient les cultures des hommes, et leur roi supplia la reine de leur prêter les chiens pour les exterminer, ce qu’elle accepta avec plaisir. Les hommes ne surent pas mener les chiens comme il le fallait, avec ordre et précision, et ces derniers plus jamais ne revinrent. Les femmes, afin d’éviter la famine rejoignirent les hommes, et chacun d’entre eux fut appelé par son roi à prendre une femme sous son toit, en fonction de son appartenance à quatre catégories bien définies, la royauté, les serviteurs, les dirigeants et leurs sujets.

Le roi invita bien sûr la reine et dans chaque maison se répandit la douce présence féminine. Il fit savoir qu’il supprimait les tabous concernant la viande et la nourriture cultivée. Au bout de quelques temps, la reine fut enceinte ainsi que les femmes des dirigeants, et ce fut le début de la reproduction humaine.

Mais avec l’union des hommes et des femmes, apparurent le désordre, l’agitation et toutes sortes de maux. On entend encore aujourd’hui un mari en colère qui se dispute avec sa femme en la traitant de chienne ; on entend encore des femmes parler de leur maison comme celles d’autrui et de leurs enfants comme ceux d’autrui. La femme mourra sans avoir ce qui lui appartient en propre et sans régner dans un pays en paix.

"Les enfants du faiseur de pluie" est un voyage dans le temps et dans l’espace. Mais c’est surtout un délicieux voyage au cour de la sagesse et de la bonté, au cour de valeurs humaines universelles.

Source

Livre

KITEREZA, Aniceti, Les enfants du faiseurs de pluie, UNESCO / L'Harmattan in. Collection Encres Noires, 1996 (France)

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