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Pratiques du droit, productions de droit : initiatives populaires en Afrique centrale (Rwanda, Burundi, République du Congo, République démocratique du Congo, Cameroun)

Realizado por Juristes Solidarités

07 / 2007

Les pays d’Afrique centrale comptent parmi les plus pauvres de la planète. La plupart ont été le théâtre de conflits particulièrement meurtriers et cherchent encore le chemin de la démocratie et de la construction d’un Etat de droit.

Confrontées à de nombreuses difficultés, les populations, appuyées par des associations, trouvent des solutions, innovent et mettent en œuvre des pratiques pour assurer leur survie au quotidien, améliorer leurs conditions de vie, participer à l’élaboration des décisions qui les concernent. Le droit est l’un des éléments essentiels de ces pratiques. Qu’il relève de la coutume ou des normes produites par l’Etat, il se trouve au cœur de la vie des personnes. Bénéficier d’un accès à l’eau, à l’électricité, à la santé, être respectée en tant que femme ou personne handicapée, disposer d’un toit ou pouvoir faire usage d’une terre nécessite souvent d’agir pour faire appliquer, évoluer ou neutraliser le droit.

L’accès au droit des populations, perçu comme l’accès à la connaissance du droit mais aussi à sa production est une question qui se pose, dans cette région du monde comme ailleurs, avec acuité. Les associations réfléchissent constamment sur les actions à mener, sur la posture à adopter pour permettre aux plus vulnérables d’améliorer leur situation. Quelle place pour la justice alternative dans des pays qui sortent de conflits meurtriers ? Comment la justice doit-elle prendre en compte la question des déplacés et de leurs droits spécifiques, notamment en ce qui concerne le retour sur leurs terres (fiche La résolution alternative des conflits dans le contexte burundais). Comment rendre complémentaires l’action de la justice étatique avec celle de la justice alternative (fiche Les structures alternatives de résolution des conflits) ? Quel rôle doit jouer le médiateur pour que les parties soient de véritables actrices de la résolution de leur conflit (fiches Le rôle et le statut du médiateur selon ULOMARE et Le rôle et le statut du médiateur selon l’ADECOM) ? Autant de questions sur lesquelles les associations de services juridiques populaires réfléchissent.

Identifier les problèmes de droit vécus par les populations

Identifier les problèmes de droit rencontrés au quotidien par les populations constitue la base de toute action en faveur du respect et de l’exercice des droits.

En Afrique centrale, ce travail peut se révéler difficile. Plusieurs raisons expliquent cela : l’isolement de certaines zones (absence de transports, éloignement géographique, etc.), l’insécurité (présence de milices, pressions sur les défenseurs des droits de l’Homme), la peur des habitants de parler de ce qu’ils vivent, etc. Pour y remédier, les associations ont trouvé différentes stratégies (fiche Identifier les problèmes de droit vécus par les populations : quelques exemples d’actions) : la formation de personnes relais, la mise en place d’une permanence téléphonique, l’organisation de séminaires d’évaluation participative, etc.

Informer et former les habitants au droit

Créer de nouveaux lieux, de nouveaux outils pour rapprocher le droit des personnes, leur permettre de prendre conscience de leurs droits, de les connaître et de les comprendre est l’un des axes fondamentaux du travail des associations. Quelle méthode adopter lorsque la majorité de la population ne sait pas lire ? Comment faire pour que les actions de vulgarisation du droit touchent un maximum de personnes et constituent des tremplins vers l’action ?

L’animation d’émissions de radio sur les marchés de Kinshasa (fiche Des émissions de radio sur les marchés de Kinshasa), l’organisation de causeries débat (fiche Les Tribunes d’Expression Populaire aux causeries-débats) ou les Universités Itinérantes Citoyennes (fiche Universités itinérantes citoyennes, Cliniques juridiques et Balcons de droit) sont autant d’initiatives qui permettent de rapprocher le droit des populations, de le démystifier pour que ces dernières puissent le percevoir comme un outil permettant de faire avancer leurs revendications.

Se mobiliser pour faire avancer ses revendications à travers le droit

Au-delà des actions d’information et de formation au droit, les associations cherchent aussi, après avoir analysé son contenu, à forcer son application ou à favoriser son évolution. La dimension collective de l’action est essentielle : tout l’enjeu est de parvenir à créer un rapport de forces favorable aux intérêts des plus démunis pour que les acteurs en charge de son élaboration et de son application les prennent davantage en compte.

Ainsi, l’ALVF (Association de lutte contre les Violences Faites aux Femmes) au Cameroun (fiche Le droit, un outil de lutte contre les discriminations faites aux femmes) contribue à faire évoluer la législation pour supprimer toutes les dispositions discriminatoires par rapport aux femmes. Parousia, association regroupant des personnes handicapées, se mobilise régulièrement pour que les droits des personnes handicapés soient reconnus par la législation congolaise et qu’ils soient appliqués quand ils existent (fiche La lutte des personnes handicapées pour la reconnaissance de leurs droits). Le CADI (Comité d’Action pour le Développement Intégral) appuie la mise en place de Comités Villageois de Développement (fiche Les Comités Villageois de Développement), espaces d’organisation des paysans leur permettant de revendiquer leurs droits et de trouver collectivement des solutions aux problèmes de droit qu’ils rencontrent. ULOMARE (Union des Locataires de Maisons et d’Abonnés à la Régie d’Eau et aux Sociétés d’Electricité) utilise divers moyens, parfois illégaux comme le dahulage (1), pour que les habitants aient légitimement accès aux services de base comme l’électricité (fiche ULOMARE : 20 ans d’action en faveur de l’accès à l’électricité des habitants de Bukavu).

Participer à la résolution de ses conflits

Dans cette région du monde où la justice et le droit sont souvent perçus comme des instruments de domination aux mains des plus puissants et au détriment de la majorité de la population qui vit dans une extrême pauvreté, de nombreuses initiatives locales se tournent vers une justice communautaire, destinée à trouver des solutions aux problèmes que vivent les populations. Les comités de médiation et les autres structures de résolution des conflits sont appelés à jouer un rôle majeur dans la dynamique de refondation des rapports sociaux à laquelle ils concourent déjà depuis longtemps.

Le monde de la justice reste trop souvent éloigné des réalités vécues par les habitants. La méconnaissance de son fonctionnement et la peur que peuvent inspirer les institutions judiciaires font obstacle à leur utilisation par les populations. Dans certains territoires isolés, se rendre au tribunal peut requérir plusieurs jours de marche. Le prix du transport, couplé au manque à gagner qu’un tel déplacement représente constituent souvent un frein suffisant pour dissuader les victimes d’intenter une action en justice. Il faut ajouter les coûts supplémentaires que cela peut impliquer : l’unique moyen de survie du personnel judiciaire consiste en effet souvent à faire payer des prestations en principe gratuites. L’enregistrement d’une plainte ou le dépôt de la moindre preuve sont ainsi soumis de façon quasi systématique au paiement d’une taxe, fixée plus ou moins arbitrairement par celui qui l’exige.

Souvent qualifiés de « justice informelle », les modes alternatifs de résolution des conflits s’avèrent généralement plus efficaces et proches des populations que la « justice formelle » qui trop souvent n’a de justice plus que la forme institutionnelle, simulacre de l’ordre judiciaire. Le recours aux systèmes de médiation animés par les chefs traditionnels a constitué et constitue toujours une possibilité de résolution alternative des conflits. De nombreuses communautés se sont également organisées afin de créer et d’animer leurs propres structures de résolution des conflits. Ainsi, le Comptoir Juridique Junior (CJJ) a mis en place au Congo Brazzaville des cliniques juridiques au sein desquelles les habitants peuvent avoir recours à un médiateur (fiche Les cliniques juridiques du Comptoir Juridique Junior), l’ASSOAL a créé des « balcons des droits » hébergés par des associations de quartier, le FCDD travaille également sur la résolution des conflits dans le centre d’aide juridique qu’elle a mis en place dans un quartier à la périphérie de Kinshasa (fiche L’implantation d’un centre d’aide juridique au sein d’un quartier défavorisé). Tout l’enjeu de ces pratiques est de sortir de la logique gagnant/perdant d’un procès et de rendre les personnes actrices de la résolution de leurs problèmes.

 

***

C’est un voyage parmi quelques-unes de ces expériences qui vous est proposé dans ce dossier. Une découverte, au fil des pages, de pratiques populaires de droit portées par des associations du Burundi, du Rwanda, de République démocratique du Congo, du Cameroun et de République du Congo, capitalisées à la suite d’une mission de terrain réalisée en novembre 2006. Toutes ces associations témoignent par leur action d’une conviction : on ne peut avancer sur le chemin de la démocratie sans combler préalablement le fossé existant entre les citoyens et le droit.

1 Raccordement clandestin aux lignes à haute tension

23 fiches

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