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Stratégies des habitants du centre de Lima

Silvia DE LOS RÍOS BERNARDINI

1999

Contexte

Localisation de l’expérience : District du Cercado de Lima, Pérou.

Le locatif est dans le pays une modalité d’occupation qui date du siècle dernier. La législation du logement locatif a été peu à peu modifiée par les différents gouvernements en cours.

L’actuelle équipe gouvernementale a effectué de grands changements juridiques concernant le logement, en commençant par la suppression du logement comme un droit de la Constitution politique du pays. Le gouvernement a aussi entrepris de grandes réformes sur la législation locative, la limitation de la protection du locataire devant les droits des propriétaires, sans envisager un régime légal d’équité entre ce dernier et le locataire. L’Etat laisse le stock du locatif au marché libre, où l’équité ne joue aucun rôle prépondérant.

Politique actuelle

Ce cadre légal fait partie de la politique de logement appliquée par le gouvernement central, dont l’un des axes est la promotion de l’investissement privé dans des parcelles sans locataires. L’Etat ne joue pas, cependant un rôle prépondérant et direct pour inciter l’entrepreneur à investir.

Six années après le vote de ces réformes légales, on ne peut que constater qu’elles n’ont pas eu l’impact attendu, en particulier pour les taudis dégradés en location. L’impact majeur en est la récente application du Programme de réhabilitation des taudis en location, appartenant à la Société de Bienfaisance de Lima et situés dans le Centre de Lima.

Ce programme s’appuie sur le fait que les bénéficiaires directs, les locataires, deviendraient propriétaires des nouveaux logements, en remboursant le montant total au moyen d’un système progressif de versements adaptés au revenu familial qui tourne autour de 100 US $/mois. Cette proposition a été modifiée ces derniers mois, en ajoutant aux versements un intérêt qui ne sera pas inférieur à 16% par an. S’ajoute aussi l’assurance de l’hypothèque, sur une durée de 15 ans, pour amortir le montant total, sans la possibilité de revoir les conditions du contrat d’achat-vente après l’avoir signé, valable de tacite reconduction. On ne donne pas aux locataires d’autres options que celles d’accepter ou de refuser en bloc cette proposition.

Cependant, parmi les locataires, il existe une préoccupation concernant les familles dont les revenus mensuels n’atteignent pas les 100 US$/mois, bien qu’elles furent acceptées et qu’elles occupent aujourd’hui les nouveaux logements. Une condition pour l’acceptation fut celle de renoncer à l’ancien logement qu’elles occupaient et de ne pas avoir d’autre propriété. L’organisation qui s’est formée depuis qu’elles ont pris possession des nouveaux logements est en train de faire des démarches pour établir un accord juste et le respect du droit de résidence en péril.

La Municipalité métropolitaine de Lima est en train de promouvoir la participation des investisseurs dans les immeubles privés mais aussi dans ceux qui lui appartiennent dans le Centre de Lima. Pour renforcer cette politique de récupération du Centre de Lima, elle a commencé des actions stratégiques telles que la récupération de l’espace public : amélioration des artères principales, aménagement de places publiques, déplacement et organisation du commerce informel et ambulant de la voie publique, amélioration de l’infrastructure de base, de l’ornementation et des espaces verts. L’impact de cette stratégie est de récupérer la rente foncière urbaine et d’élever son prix pour attirer ainsi le secteur privé investisseur.

Ce programme ne comprend pas de projets d’intérêt social qui pourraient protéger le petit vendeur de faibles ressources, afin qu’il puisse bénéficier d’un espace pour travailler. L’habitant des taudis qui ne peut pas acquérir le logement qu’il habite, n’a pas non plus d’autres options claires de relogement.

Tendance du locatif

Sur la base des résultats des deux derniers recensements nationaux de la population et du logement en 1981 et 1993, on constate que le parc de logements privés locatifs a eu un accroissement au niveau national de 5,531 unités (2 %) au cours des 12 dernières années. Le total de logements privés locatifs dans le pays est passé de 480 506 en 1981, à 486 037 en 1993. Les dernières réformes juridiques et les politiques de récupération des centres urbains, soumises aux lois du marché, n’ont pas modifié de manière significative la proportion des logements locatifs comme solution pour vivre et lutter contre la pauvreté.

En distribuant ce total sur la période 81-93, on observe sur 12 ans que le parc de logements privés locatifs en zone urbaine décroit de 12 433 unités et augmente de 17 964 unités en zone rurale. La dernière enquête appliquée en 1994 aux foyers nationaux montre une augmentation du parc de logements locatifs dans les zones montagneuses urbaines. Au niveau de la zone métropolitaine de Lima, 182 417 logements sont loués (16,5 %) et 640 559 logements sont occupés par les propriétaires (58 %). Dans cette catégorie, on admet les logements des établissements humains légalisés et les petits propriétaires des taudis. Cette croissance des petits propriétaires est le résultat de l’attitude des populations aux revenus moyens et bas face à un cadre normatif du locatif qui ne les protège pas en tant qu’habitants d’un logement. Pour s’assurer un lieu pour vivre ils n’ont pas d’autre option que d’acheter leur logement.

La politique des gouvernements successifs, comme celle des agents économiques a toujours consisté à défendre la propriété comme un régime d’occupation du logement sûr et définitif. Pour cette raison, les secteurs les plus faibles économiquement ont engagé des actions comme celle d’occuper la périphérie ou les limites urbaines extérieures des grandes villes comme Lima pour édifier leurs logements, « résolvant » ainsi leurs problèmes de logement avec un coût social élevé. Dans ce cas, l’Etat se limite à contrôler l’occupation de ces secteurs sociaux en les rendant propriétaires dans un espace urbain anarchique, avec ses défauts et ses qualités.

Les propriétaires des immeubles locatifs

À Lima, les propriétaires des immeubles locatifs du centre, qu’ils soient en bon ou en mauvais état, se divisent en deux grands groupes : les privés et les publics. Parmi les propriétaires privés, on trouve les entreprises immobilières, l’Eglise, les Universités privées telle que la Pontificia Universidad Católica, etc. Parmi les propriétaires publics on trouve la Société de Bienfaisance de Lima, les Universités publiques telles que l’Université Nationale Supérieure de Saint Marc, la Municipalité de Lima, l’Institut Péruvien de Sécurité Sociale, etc. Les propriétaires les plus importants sont : la Société de Bienfaisance de Lima, l’Université Nationale Supérieure de Saint Marc, l’Eglise, la Municipalité de Lima et les familles qui ont acquis des biens par héritage.

Postérieurement au changement de gestion municipale et à l’augmentation des tensions entre le Gouvernement central et la Municipalité, la récupération du Centre de Lima est considérée comme prioritaire pour le pays. Cette situation est devenue plus critique ces deux dernières années. La Société de Bienfaisance de Lima, avec l’appui du pouvoir exécutif, annonce un programme de suppression des taudis. Tandis que la Municipalité de Lima porte plainte contre ses locataires mauvais payeurs, l’Université Nationale Supérieure de Saint Marc arrive aujourd’hui jusqu’à 300 ordres d’expulsion de locataires. La PUC (Université Catholique) a commencé un processus d’analyse de ses propriétés afin de déterminer son intervention.

Les propriétaires qui mènent jusqu’au bout les poursuites et arrivent jusqu’à expulser les locataires sont la Municipalité de Lima et la Société de Bienfaisance. Jusqu’à aujourd’hui beaucoup de ces poursuites ont été freinées par les organisations de locataires, qui négocient depuis plus de trois ans les montants et les augmentations des loyers.

Les modes de négociation entre les locataires et les propriétaires sont réglées par le marché sans aucune distinction, l’équité et la solidarité n’ont pas cours. L’habitat est une simple marchandise urbaine qui est acquise par celui qui offre un meilleur prix au propriétaire. CAPECO, la Chambre péruvienne de la construction, affirme que le logement serait accessible à tous s’il y avait une aide à la demande et des systèmes de crédit appropriés.

Description du processus

Les habitants du Centre de Lima sont menacés d’expulsion principalement à cause de la dégradation progressive de leur logement et de l’absence d’une politique de rénovation urbaine. S’ajoute à cela la politique de libéralisation des loyers dont nous parlerons plus loin. Toutefois jusqu’à maintenant, la mobilisation des locataires a pu retarder le passage des loyers sur le marché libre.

La législation a changé, ces dernières années, sur l’utilisation du sol qui libère les zones qui avaient été attribuées à des communautés paysannes, ce qui favorise encore les expulsions.

Face à ces difficultés accrues, les locataires des taudis ont organisé une résistance qui a provoqué des changements dans la politique publique qui seront décrit plus loin.

Les locataires du Centre de Lima et des districts environnants tels que La Victoria, Rimac et Breña de la Province de Lima, se sont rassemblés il y a plus de cinq ans dans différents comités et associations dont les plus représentatifs sont les suivants :

– Le Comité de défense des immeubles de l’Association de bienfaisance publique de Lima, CODEINBEL qui regroupe 450 familles (2 200 hab.) ;

– L’Association centrale des organisations de locataires de la municipalité métropolitaine de Lima qui regroupe 300 familles (1 500 hab.) ;

– L’Association des locataires de l’Université nationale supérieure de Saint Marc qui regroupe 500 familles (3 500 hab.) ;

– Comités et associations de locataires des propriétés privées.

Face à la politique nationale de libéralisation des loyers sans aucun contrôle ni politique sociale pour les habitants des bâtiments dégradés, surpeuplés et classés comme des taudis, ces organisations ont entrepris depuis 1993 différentes actions dans le but d’élaborer des mesures de protection et permettre l’accès à un logement décent.

Les principales actions sont :

Au niveau de l’organisation

— renforcer sa capacité de gestion et démocratiser la prise de décisions. Le fruit de cette action fut de mettre en place dans un nombre significatif d’organisations un système de gestion structuré de bas en haut, en augmentant le nombre des membres.

– continuer de valoriser la participation de la femme dans l’organisation et la mobilisation.

Vers l’extérieur de l’organisation

– promouvoir le processus de centralisation des organisations. Création en 1997 de la Coordination des voisins pour la rénovation urbaine, suppression des taudis et défense des locataires qui comprend jusqu’à aujourd’hui 7 organisations de locataires regroupées autour d’une plate-forme commune.

Au niveau de la plate-forme de programmation

– Promotion de la formulation de propositions qui protègent et permettent l’accès à un logement décent pour les locataires des taudis. Ces propositions se sont transformées en projet de Loi (avec l’appui de l’équipe de CIDAP).

– Diffusion et pressions pour imposer les propositions

– Campagnes de presse pour réaffirmer le thème du locatif dans les taudis et l’accès à un logement décent dans le Programme national.

– Réunions et entretiens avec des fonctionnaires et des autorités du Gouvernement central et de la Municipalité de Lima.

– Graffitis et banderoles dans les taudis pour sensibiliser aux thèmes inclus dans la problématique et les propositions.

– Manifestations pacifiques pour dénoncer la problématique, présentation des propositions et des projets de Loi au Parlement et à l’exécutif.

Résultats du processus

Les actions stratégiques mentionnées plus haut furent planifiées et exécutées par les organisations au niveau de la base et au niveau de la Coordination et ont permis d’obtenir les résultats suivants :

– Trois décrets qui prolongent le bail sur les loyers des immeubles de faible coût (taudis) depuis 1994 jusqu’à aujourd’hui.

– Le Décret du DS 038 officialise le développement et l’exécution des travaux du Gouvernement central pour la suppression des taudis appartenant à la Société de bienfaisance publique de Lima dans le centre historique, pour le bénéfice de près de 300 familles locataires. On continuera par la suite avec d’autres immeubles.

– La création d’une organisation centrale de locataires et de voisins qui habitent les taudis dans Lima est une mesure stratégique.

Les acteurs impliqués dans le processus et leurs rôles

Les organisations de locataires

Les locataires des taudis organisés et non organisés furent le moteur principal pour la construction de la plate-forme de revendications et du programme d’action, mais aussi l’entité mobilisatrice des différentes instances de centralisation.

La Coordination des voisins pour la rénovation urbaine, suppression des taudis et défense des locataires

Cet organe métropolitain, ouvert par définition, est l’instance centralisatrice qui doit être un espace de caractère unitaire et de prise de décisions démocratiques, qui va plus loin que la bureaucratie organisée actuelle. De plus, il centralise les propositions et mobilise les organisations de locataires.

Les Organisations non gouvernementales

CIDAP : elle assume le rôle d’appui aux organisations de locataires des taudis et aide au processus de formulation des propositions, projets de normes, négociations avec l’Etat et la construction d’une stratégie pour l’établissement d’une plate-forme des locataires.

Le Gouvernement central

C’est le propriétaire des taudis en locations, législateur et exécuteur des normes sur les loyers qui réduisent la protection des locataires à une peau de chagrin. C’est aussi l’administrateur absolu du FONAVI et le maître d’oeuvre des programmes insuffisants de suppression des taudis.

La Municipalité métropolitaine de Lima

C’est le propriétaire des taudis en locations. Actuellement, l’application de sa politique de récupération du Centre Historique, qui intervient sur l’espace public, élève le prix des terrains urbains et des bâtiments, renforce la ségrégation urbaine et favorise les expulsions progressives des familles qui ne peuvent acheter ces terrains. Jusqu’à maintenant, cette politique n’offre pas de programme d’intérêt social pour les familles qui ne peuvent pas acheter. Sa politique de rénovation des propriétés dégradées s’appuie sur le marché libre. Y accède celui qui en a les moyens.

Palavras-chave

despejo, moradia insalubre, propriedade própria, cidadezinha, política de meio ambiente


, Peru, Lima

dossiê

Vivre dans les centres historiques : expériences et luttes des habitants pour rester dans les centres historiques

Comentários

L’actuel modèle économique basé sur le libre marché et la globalisation produit dans nos villes des effets pervers, tels que celui de renforcer la ségrégation urbaine et laissant sans protection les groupes les plus vulnérables tels que les sans-abri et les locataires des taudis.

La population organisée a fourni des réponses qui ont laissé des traces sur les politiques publiques. Les principaux acteurs de cette mobilisation sont des femmes, fortement engagées dans le processus d’accession à un logement décent.

Notas

CIDAP : Jr. Ricardo Bentín Nº763, Rimac, Lima, PÉROU - Tel/fax : 481 47 04 ; 381 00 80 - postmaster@cidap.org.pe

CIDAP (Centro de Investigación, Documentación y Asesoría Poblaciona) - Jr. Húsares de Junín 654, Jesús María, Lima 11- PERÚ - Peru - www.cidap.org.pe/ - postmast (@) cidap.org.pe

HIC MEXICO (Coalición Internacional para el Hábitat) - Tacuba #53, 1er. piso - Colonia Centro, 06000 México D.F.MEXIQUE - Tel: + 52-55-5512 1586 - Telefax: + 52-55-5512 6726 - México - www.hic-al.org - info (@) hic-al.org

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